LEON DENIS
LAPÔTRE DU SPIRITISME
SA VIE, SON UVRE
Synthèse du livre de Gaston
LUCE
par Lucette DAMICO
Léon DENIS est né le premier janvier 1846 à FOUG, localité de larrondissement de TOUL. Son père, Joseph DENIS, était maçon. Sa mère, Anne-Lucie LIOUVILLE, de souche paysanne, était née à MENIL LA HORGNE, commune de GONDREVILLE. Les noces eurent lieu à FOUG le 3 avril 1845.
A lâge de neuf ans, il vient se fixer à STRASBOURG avec sa famille. Cest donc à STRASBOURG, au cours privé de Monsieur HAAS, que le petit Léon fait ses débuts décolier.
Nouveau déménagement à BORDEAUX, où Léon doit interrompre ses études pour aider son père. En 1857, celui-ci obtient un poste de chef de station de MORCENX dans les LANDES et Léon reprend le chemin de lécole.
Son nouveau maître, disciple de Jean Jacques ROUSSEAU, instruit son élève en lemmenant en promenade : celui-ci devait garder toute sa vie un souvenir ému de ce contact direct avec les choses.
Nouveau déménagement à MOUX. Léon supplée aux manquements paternels, laissant les chers livres quil affectionne. Il soccupera des télégrammes et de la comptabilité.
En 1862, la famille sinstalle à TOURS. Léon travaille dans une faïencerie ; il passe dans une autre maison de commerce où il travaille aux écritures. Menant de front sa tâche du jour et ses études, notre Léon na de loisirs que pour la plus austère des maîtresses, celle qui veille sous la lampe devant les pages des livres . Le problème que dordinaire lhomme ne se pose que dans les heures daffliction ou de maladie grave et quil sempresse doublier dès que le destin lui sourit, Léon en saisit limportance capitale. Lhomme se rue au plaisir, senivre de sensualité pour échapper à lidée de la mort sans arriver jamais à léluder.
Quest-ce que la sagesse ? Cest apprendre à mourir , dit PLATON.
Quest-ce que la vie ? Cest une méditation de la mort , dit SENEQUE.
Ainsi le jeune étudiant aborde de front lénigme où tant de hautes spéculations se sont heurtées.
Au cours de sa dix-huitième année, le hasard qui fait bien les choses désigne un jour à son intention un ouvrage au titre inusité, troublant. Cest LE LIVRE DES ESPRITS dAllan KARDEC.
Rencontre providentielle.
Après avoir mené quelques expériences avec des amis, il commence à chercher des preuves, des faits précis. Ceux-ci sont loin de le satisfaire, et il aurait renoncé sil navait été soutenu par une théorie solide et des principes élevés. Et il ajoute ces mots quapprécieront les vrais spirites :
Il semble en effet, que linvisible veuille nous éprouver, mesurer notre degré de persévérance, exiger une certaine maturité desprit avant de nous livrer ses secrets.
Léon DENIS en est là de ses travaux et recherches lorsquun événement important se produit dans sa vie. Allan KARDEC était venu passer quelques jours chez des amis, et tous les spirites tourangeaux avaient été conviés à venir le saluer. Cétait en 1867. Il devait le revoir deux fois encore, en son logement rue Sainte Anne à PARIS, puis à BONNEVAL.
Cest après le passage du Maître que sera fondé, à TOURS, le groupe de LA RUE DU CYGNE, dont il deviendra secrétaire.
Jappris par là, combien il est dangereux de se livrer à lexpérimentation spirite sans préparation, sans protection efficace et ces exemples me rendirent circonspect.
Léon DENIS a 24 ans en 1870, cest alors la guerre. Dabord exempté du service à cause de sa mauvaise vue, il doit quand même rejoindre les réservistes auxquels le pays fait appel après des combats désastreux. Il rejoint alors à la ROCHELLE le 26ème corps darmée. De suite, il est nommé sergent au 1er bataillon et dira :
Dans lespace de six mois, je devins successivement sous-officier, major, sous-lieutenant et je serais encore monté en grade si la paix nétait survenue.
Un sergent de sa compagnie étant médium, en février 1871 il convie celui-ci et quelques camarades à venir expérimenter. Le 24 du mois le groupe reçoit la communication suivante :
LAllemagne et la France attendent avec anxiété le résultat des négociations, elles attendent lheure tant espérée de la paix où toutes les familles connaîtront ceux qui manquent à lappel du cur dune mère ou dun frère. Ceux-ci maudiront, dans les deux nations, les tyrans qui leur ont enlevé leur soutien et leur seul espoir. Alors à vous de profiter de ces choses pour éclairer vos frères. Faites leur voir la grandeur de Dieu. Priez, consolez la souffrance. En un mot, faites le bien.
Le 28, un message sur les mondes célestes se termine par cette phrase prophétique qui a mis un demi siècle à se réaliser :
Mes amis, un fait solennel saccomplit en ce moment selon le désir des hommes. Cest la paix qui vient dêtre signée et dans quelques jours vos familles vous tendront les bras. Avant peu dannées, la Prusse à son tour sera anéantie, humiliée. Priez, priez.
Servi par un don naturel pour lélocution, il sentraîne à la parole ; orateur écouté de la Loge Maçonnique des Démophiles, il y effectue un travail considérable.
Le groupe de LA RUE DU CYGNE à TOURS sest renforcé dune recrue notoire : le Capitaine HARMANT. Les séances reprennent avec un nouvel entrain chez le Docteur AGUZOLY. A son contact, Léon DENIS, qui était déjà médium écrivain, devient voyant. Il reconstitue à létat de veille des scènes impressionnantes de lhistoire médiévale et de lhistoire ancienne.
SORELLA est le bon génie. DURAND, lEsprit contrôle .
Les belles séances de LA RUE DU CYGNE devaient continuer chaque semaine jusquen 1877. Dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier 1873, une assemblée nombreuse desprits emplit tout à coup la salle dont les murs et le plafond se couvrent détincelles fluidiques.
Cest le 19 février 1873 que Léon subit ses premiers examens devant cinq maîtres spirites. Assisté par SORELLA, il lit son deuxième discours. Tout est bien , lui dit-on, à part quelques points de détails. Les progrès accomplis sont sensibles et justifient les espoirs que lon a mis en toi.
Le 17 mars, il parle du matérialisme en séance privée devant les Démophiles ; son précédent discours traitait du patriotisme, le troisième sera une apologie du spiritisme.
Malheureusement, avec le temps ses idées spiritualistes ne seront plus suivies.
Autour de Léon DENIS, cest partout, jusque dans sa famille, lincompréhension, lhostilité même. Lui-même voit de plus en plus difficilement et sa santé saffaiblit. Heureusement, lange consolateur lui verse le baume dont il a tant besoin et lencourage. Son fidèle guide, à son tour, lui apportera son secours moral : On narrive à la foi pleine et entière , dira-t-il, que par une lente et douloureuse initiation.
Le 31 juillet 1873, une révélation lui est faite. Dans ses vies antérieures, il pénètre le secret qui doit illuminer toute sa destinée : il retrouve dans SORELLA une incarnation de Jeanne DARC à laquelle il consacrera une majeure partie de sa vie et de son oeuvre.
Le 20 août de la même année, Léon DENIS et ses amis, AGUZOLY et le Capitaine HARMANT, apprennent dans quelles circonstances se fit jadis leur première rencontre, à lissue dun combat naval sous Louis XIV.
A partir de 1876, Léon DENIS va beaucoup voyager.
Il effectue de multiples voyages pour affaires commerciales, ce qui lui permet de rencontrer comme il lavait toujours désiré dautres paysages, dautres hommes, dautres moeurs. Cest à pied, bâton à la main tel un pèlerin quil traverse la France ; il visite aussi la KABYLIE, la TUNISIE, la SARDAIGNE, la CORSE, lITALIE.
Il publiera dintéressants récits tirés de ses voyages.
Ses premières publications datent de 1880 : dabord TUNIS ET LILE DE SARDAIGNE, puis deux nouvelles : LE MEDECIN DE CATANE et GIOVANNA.
Lopuscule LE PROGRES publie, sous les auspices de la ligue de lenseignement, le texte dune de ses premières conférences ; cette thèse, Loi de solidarité qui relie tous les temps et toutes les races , demande à être éclairée.
Le 31 mars 1881, on lui demande de prononcer lhommage traditionnel sur la tombe DAllan KARDEC au cimetière du Père Lachaise.
Le 2 novembre 1882, jour des morts, un événement capital se produit dans sa vie. Celui qui devait être son guide pendant un demi siècle, son père spirituel Jérôme De PRAGUE, se communique à lui pour la première fois dans un faubourg du MANS, où Léon se trouve de passage. Au mois de mars suivant, Jérôme lassure dune assistance qui ne devait pas se démentir un seul jour :
Va, mon fils, dans le sentier ouvert devant toi, je marche derrière toi pour te soutenir .
En décembre 1882 il prend part aux travaux du congrès chargé denregistrer la fondation de la société des études spirites.
Le Docteur JOSSET préside la réunion, assisté de Messieurs CHAIGNEAU et DELANNE père, comme secrétaires ; Monsieur LEYMARIE en est lanimateur.
Le Docteur JOSSET souligne combien la présence de Léon DENIS est précieuse en un tel jour où devait saffirmer la solidarité des spirites provinciaux et parisiens : ce que nous pouvons rendre, en écrivant , dit le compte-rendu de la séance, cest la chaleur, linspiration, la majesté du langage de léminent conférencier .
Les dirigeants, on le devine, désirent sattacher un orateur de cette envergure.
En novembre 1883, il est au groupe régional du MANS pour la fête des morts. A ROCHEFORT, le 14, il parle des existences progressives des êtres . Les conférences se poursuivent, à COGNAC le 16, puis à AGEN.
En 1885, dans LE POURQUOI DE LA VIE, il dit :
Cest à vous, ô mes frères et soeurs en humanité, à vous tous que le fardeau de la vie a courbés, à vous que les âpres luttes, les soucis, les épreuves ont accablés que je dédie ces pages .
La brochure remporte un grand succès.
Dès le mois de Mai 1885, il est vice-président de lUnion Spirite Française, fondée le 24/12/1882 et Membre dHonneur de multiples sociétés, notamment de lUnion Spirite de Catalogne.
1886 : décès de son père, Joseph DENIS.
En 1889, pour le congrès spiritualiste international, les principales écoles spiritualistes sont réunies : les KARDECISTES, les SWEDENBORGIENS, les THEOSOPHES, les KABALISTES et les ROSES CROIX.
Au cours de discussions fort animées, le jeune maître apparaît pour la première fois comme le plus sûr mainteneur de la thèse kardéciste. Il est président du comité de propagande.
Dans son compte-rendu de la revue LETOILE, que dirige alors René CAILLE, LAbbé ROCCA, cur brûlant de foi christique, sexprime ainsi :
Je dois mentionner les chaleureuses improvisations de Monsieur DENIS de TOURS qui a pris la parole plus de trente fois, toujours avec le même bonheur. Je me rappelle, en lécoutant, cette promesse de Jésus-Christ : Quand vous aurez à rendre témoignage de moi, ne vous préoccupez pas de ce que vous devez dire. Lesprit sera là qui vous suggérera tous vos discours.
Léon fait paraître fin 1890 un texte intitulé APRES LA MORT. Malgré de louables efforts, il na pu condenser le tout en 300 pages comme il avait prévu de le faire, mais personne na jamais songé à sen plaindre.
Les critiques seront élogieuses, par exemple cet extrait des registres des messages par incorporation à TOURS :
Je veux parler du temps qui sécoule entre les épreuves imposées et la récompense. Je dois le redire, tout charme dans ces pages malgré la gravité du sujet .
Monsieur DUCASSE-HARISPE dit également :
Tout livre est bon qui nous incite à devenir meilleur. Lisez ce livre. Il est dune philosophie sereine et profonde. Cest un livre quon garde et quon relit .
On peut noter encore le témoignage de cet homme qui vient de perdre sa femme, athée comme lui. Il rentre en lui-même et médite, scrute les mystères, les religions, lit les philosophes et écrit :
Je nétais pas sans savoir, dune façon générale en quoi consistait le spiritisme, mais lorsquon est bien portant avec devant soi des années, pourquoi sembarrasser de ces questions de lau-delà ? On a parfois, devant limmensité des mondes, lintuition dune intelligence créatrice. Dieu ne fait en nous que de fugitives apparitions. On pense à vivre et tout à coup, la Mort. Jai lu Allan KARDEC, dautres traitant des questions spirites. Jai lu APRES LA MORT et jai pleuré les plus douces larmes de ma vie. On nous a dit, des écrivains, des journalistes, des penseurs vous ont écrit que cétait là un très beau livre. Ce nest pas cela. Ce livre, je voudrais être riche pour léditer par millions et le voir dans toutes les mains, sur toute la terre. Rien ne sera jamais écrit dans aucune langue qui soit si grand et si beau .
A partir de 1889 commencent de grandes tournées de conférences.
En 1890, il prépare un nouvel ouvrage : LE MATERIALISME ET LE SPIRITUALISME EXPERIMENTAL DEVANT LA SCIENCE ET DEVANT LA RAISON.
En 1891, autre tournée de conférences dans le midi, puis en Normandie.
Jean JAURES, alors professeur de philosophie et adjoint au Maire de Toulouse, lui ouvre la salle de conférences de la faculté des lettres.
En 1892, La Duchesse De POMAR linvite pour parler de spiritisme à ses matinées célèbres qui réunissent le Tout-Paris. Léon DENIS accepte : lauteur dAPRES LA MORT est maintenant classé comme un écrivain de premier ordre.
Suit un cycle de conférences en Belgique en 1893.
La même année, à LYON, il développe le thèmes des croyances et des négations de son époque : LE SPIRITISME DEVANT LA RAISON. Cette même année à BORDEAUX, la presse locale refuse dannoncer les conférences. Elles eurent lieu tout de même dans la salle des fêtes de la brasserie des chemins de fer, devant un millier dauditeurs dont beaucoup de Magistrats, de Prêtres.
En 1894, les mêmes conférences remportent un éclatant succès, toujours à BORDEAUX, mais cette fois dans la salle de lAthénée.
Rien ne rebute Léon DENIS, soldat dune cause quil a faite sienne.
Au début de 1895, on lui demande de parler de spiritisme dans le BORINAGE devant un auditoire composé de mineurs. Il aborde pour la première fois le SPIRITISME SOCIAL. Léon DENIS aime ces populations minières, frustres mais non dénuées de solides qualités.
Entre 1895 et 1896, il se consacre à différents exposés :
DU PROBLEME DE LA VIE ET DE LA DESTINEE
LIDEE DE DIEU
LE MIRACLE DE JEANNE DARC.
1897 : Année record, puisquil effectue vingt-cinq conférences sur ces sujets.
1898 : A loccasion du cinquantenaire du spiritisme, il élargit son champ daction en parlant à la HAYE.
1899 : Encore quatorze conférences sur LE SPIRITISME DANS LE MONDE ET LIDEE DE DIEU.
En 1900 il prend sept fois la parole à ALGER et continuera ensuite ses conférences en France avec toujours un énorme succès.
En 1903 : son sujet de prédilection sera Jeanne DARC.
Sa mère décédera cette année-là et ses obsèques auront lieu à TOURS le 19 novembre. Léon DENIS ne manquait jamais de lui écrire au cours de ses voyages pour la tenir au courant de ses succès ou de ses échecs oratoires. Lorsquil rentrait à TOURS rue de lAlma il retrouvait grâce à elle lambiance paisible qui lui était nécessaire.
A VALENCE, quelques jours après, Henri BRUN et Henri SAUSSE, les dévoués dirigeants de la fédération lyonnaise, viennent lui exprimer la profonde sympathie de leurs adhérents.
Ainsi, chaque année Léon DENIS simpose la fatigue de ces tournées continuelles, au sein dauditoires mêlés où il doit répondre aux sarcasmes dadversaires plus ou moins loyaux.
Cinq conférences en 1905, six lannée suivante, huit en 1907.
1908 marque la fin de cette longue étape oratoire répartie sur trente-cinq années, et comprenait près de trois cents conférences.
Le pays tout entier avait donc été à même de cueillir le bon grain de la révélation.
En 1890, Monsieur PERINNE, Magistrat à la cour dappel dALGER et LEJEUNE, intendant de larmée à METZ, viennent sinstaller à TOURS. Tous deux sont spirites. Cest avec leur concours que Léon DENIS forme le groupe de LA RUE DU REMPART. Bien des guides se révélèrent au groupe, anonymes ou intimes, mais les deux principaux inspirateurs du groupe sont Jérôme De PRAGUE et LESPRIT BLEU.
Jérôme fournit au groupe les enseignements philosophiques, élucide les points obscurs, explique les contradictions apparentes de notre doctrine. Son désir est de voir fusionner le spiritisme avec le christianisme régénéré, débarrassé de ses dogmes.
LESPRIT BLEU (ainsi nommé parce que les médiums le voient invariablement enveloppé dun voile bleu) possède un rayonnement intense et remplace, au soir de la vie du Maître, la lumière qui se retire de son regard. Il donne des enseignements généraux relatifs surtout à la famille et à léducation des enfants.
Lensemble constitue un enseignement complet, philosophique et moral, conforme aux principes exposés par Allan KARDEC, mais revêtant une forme plus éloquente et plus persuasive.
En août 1898, parution du livre CHRISTIANISME ET SPIRITISME.
Nous savons , dit lauteur dans sa première préface, tout ce que la doctrine du Christ contient de sublime ; nous savons quelle est par excellence une doctrine damour, une religion de pitié, de miséricorde, de fraternité parmi les hommes. Mais est-ce bien cette doctrine quenseigne lEglise romaine ? La parole du Nazaréen nous a-t-elle été transmise pure et sans mélange, et linterprétation que lEglise nous donne est-elle exempte de tout élément étranger et parasite ?
Tels sont les points que lauteur se propose délucider en toute bonne foi.
Louvrage comprend quatre parties :
* Les vicissitudes de lévangile ;
* La doctrine secrète du christianisme ;
* Relations avec les esprits des morts ;
* La nouvelle révélation.
Son étude impartiale ne tend quà jeter un peu de lumière dans une question dun intérêt capital. Pourtant les attaques lui viennent du côté catholique et protestant.
En exposant sa thèse, Léon DENIS nobéit à aucun calcul, il sert lidée quil croit vraie.
Du côté catholique on sest mépris sur les intentions de lauteur. Pourtant il a expressément déclaré dès lintroduction :
Ce nest pas un sentiment dhostilité ou de malveillance qui a dicté ces pages. De la malveillance, nous nen avons aucune idée, pour aucune personne. Quelles que soient les erreurs ou les fautes de ceux qui se recommandent au nom de Jésus et de sa doctrine, ils ne peuvent diminuer le profond respect et la sincère admiration que nous avons pour la pensée du Christ.
Il écrit plus tard :
Le christianisme porte en lui des éléments de progrès, des germes de vie sociale et de moralité qui, en se développant, peuvent produire de grandes choses, soyons donc chrétiens mais en nous élevant au-dessus des confessions diverses, jusquà la source pure doù lévangile est sortie. Le christianisme ne peut-être ni jésuite, ni janséniste, ni huguenot ; ses bras sont largement ouverts à toute lhumanité.
Si de telles paroles ne peuvent satisfaire, dans son ensemble, le clergé catholique ou protestant, elles sont susceptibles de rallier un grand nombre de chrétiens.
Les journalistes de LA FRONDE et de LA REVUE DE LA FRANCE MODERNE sont favorables au livre. Le REFORMATEUR écrit :
Nous ne saurions donner au lecteur une idée, même affaiblie, de cet ouvrage extraordinaire, de la vigueur et de léloquence de ces pages où lauteur a su déployer toute la lucidité de son âme de philosophe, de penseur et dartistes et encore une fois le succès vient récompenser lécrivain.
Au congrès du 16 septembre 1900 à PARIS, Léon DENIS est nommé président effectif assisté de Monsieur H. DURVILLE pour la section magnétisme, et Monsieur GILLARD pour la théosophie. Le Docteur ENCAUSSE (Paris) est maintenu dans ses fonctions de secrétaire.
Victorien SARDOU, RUSSEL, WALLACE et AKSAKOFF participent à ces deuxièmes assises spiritualistes, chacun au titre de président dhonneur.
Dès la séance douverture. Léon DENIS exprime sa confiance dans les destinées du spiritualisme moderne. Il aborde les questions suivantes :
Ce caractère particulier du spiritisme, quel est-il ?
Quelle sera laction du spiritisme dans le domaine de la pensée ?
Monsieur Firmin NEGRE fait dintéressantes déclarations sur les facultés médiumniques communes à tous les hommes. Léon DENIS, le Maître de Tours, a apporté sur ce point une contribution des plus précieuses. Le Docteur MOUTIN, président de la Société Française détude des phénomènes psychiques, apporte toute une série dobjections relatives à la thèse réincarnationiste. Léon DENIS déploie toutes les ressources de sa conviction sappuyant sur la thèse kardéciste, quil estime capitale.
Il examine ensuite les théories contraires, ne laissant aucune objection sans réponses.
La doctrine de linitiateur nest pas sans subir des atteintes assez brutales, mais le disciple a tenu à préciser sa propre pensée devant tous.
Ce qui caractérise aujourdhui le spiritisme, cest le maintien des principes fixés par Allan KARDEC et son développement constant par les méthodes expérimentales.
Cependant, pour nous le spiritisme nest pas tout en KARDEC ; le spiritisme cest une doctrine universelle et éternelle, qui a été proclamée par toutes les grandes voix du passé sur tous les points de la terre et qui le sera par toutes les grandes voix de lavenir.
Les plus grands problèmes seront abordés à ce congrès de 1900, dont cette question essentielle : Y a-t-il lieu daffirmer lexistence de Dieu ?
Léon DENIS ne peut pas rester en dehors dun tel débat. Il sy jette avec toute lardeur et la foi de son âme dapôtre.
Vous ne pouvez pas séparer leffet de la cause, vous ne pouvez pas séparer lhomme de DIEU. Et je dis plus encore : je dis : en dehors de DIEU, de laffirmation de DIEU, il ny a pas dhumanité. Parce que la notion dhumanité, nest-ce pas ce fait que nous sommes reliés les uns aux autres par un lien puissant, reliés par une identité de nature dorigine et de fin ? Et tout cela est DIEU, tout cela vient de DIEU.
DIEU est le père de lhumanité : nous sommes tous ses enfants et cest par cela que nous sommes unis les uns aux autres à jamais.
Puis plus loin :
Lhomme ne peut pas sétudier et se connaître sans étudier DIEU, non pas en soi, mais dans les rapports que nous entretenons avec lui, et non seulement on le conçoit, mais on veut le servir.
Fermeté, bon sens et prudence alliés à une foi rayonnante, on ne peut quadmirer tant de force brillante et sûre delle, jointe à tant de simplicité. De ce congrès de 1900, Léon DENIS sort encore grandi, avec au front la couronne de MAÎTRE.
A cette époque dactivité intense, la tâche du conférencier se double de celle de lécrivain. Il publie en 1903 DANS L'INVISIBLE, ouvrage comprenant 500 pages de texte.
Une question requiert alors toute lattention de Léon DENIS : celle de la médiumnité...
Depuis la publication du LIVRE DES MEDIUMS dAllan KARDEC, personne navait publié douvrage décrivant les résultats de semblables recherches. Dans la première partie de louvrage qui a trait aux lois du spiritisme expérimental, on trouve des vues nouvelles sur la psychologie féminine. Cela paraît osé en ce début de siècle. La deuxième partie est consacrée à la médiumnité en général, à sa pratique, à ses dangers, aux hypothèses et aux objections quelle soulève.
Le dernier paragraphe, La Médiumnité glorieuse, écrit dans une forme admirable, est comme soulevé par un souffle de haute et brûlante inspiration.
Au mois de juin 1905, les spiritualistes belges reçoivent à Liège pour participer à leurs travaux, à titre de président dhonneur, celui que lon appelle déjà lapôtre .
A partir de cette date, il aborde le PROBLEME DE LÊTRE ET DE LA DESTINEE . Lintérêt vient de la parfaite analogie des messages des esprits avec les enseignements des philosophies et croyances les plus anciennes dont elle apporte une formule plus précise, plus conforme à nos goûts actuels.
Cet important volume de 500 pages reçoit un franc succès.
Lannée suivante un scandale éclate chez les spirites parisiens. Un médium nommé MILLER résidant à SAN FRANSISCO donne des séances de matérialisations. Il a un don médiumnique indéniable avec en plus un talent accompli dillusionniste. Les gens exercés ne sont pas longs à découvrir les supercheries, mais ils se taisent par politesse. Léon DENIS qui a parlé favorablement de MILLER se tient sur ses gardes et pousse le scrupule jusqu'à le prévenir de sengager à renoncer à ses supercheries. MILLER nie tout. Léon DENIS nhésite plus : il faut publier la vérité, larticle quil fait paraître est ferme et mesuré.
Cest au milieu de laffaire MILLER que paraît LA VERITE SUR JEANNE DARC . Léon DENIS, que des révélations personnelles ont éclairé, ne cesse depuis sa jeunesse de méditer sur le mystère de la vie et de la mort de notre héroïne nationale.
Dès 1877, il aborde cette question et la reprend par la suite, dans LE GENIE DE LA GAULE et NOS VERITABLES TRADITIONS NATIONALES.
En 1896, il développe sa thèse en trois grandes conférences : Jeanne DARC, sa vie, son procès, sa mort ; Jeanne dARC, ses morts ; Jeanne DARC et le spiritualisme moderne . Des ouvrages, des essais contradictoires sont nés de ce mouvement didées.
En 1912 le livre paraît sous un titre nouveau : JEANNE DARC MEDIUM.
Monsieur DEVIZES DU DESERT doyen de la faculté de CLERMONT FERRAND, après une étude de cet ouvrage écrit un magistral article dans le LIEN ; il termine larticle en opposant le livre de Léon DENIS à celui dAnatole FRANCE ayant trait au même sujet :
Le livre de Monsieur DENIS est un beau et bon livre, comme le livre de Monsieur FRANCE est un mauvais et vilain livre .
Du 14 au 18 mai 1910 Léon DENIS est convié au titre de délégué de la France et du Brésil au congrès de BRUXELLES. Le Président, Monsieur Le CHEVALIER De CLEMENT De ST MARC, lui adresse dès la séance douverture le témoignage de son admiration pour ses travaux.
Léon DENIS remercie dans une improvisation jaillie de son cur dapôtre.
Le 17 mai il prononce un de ses plus remarquables discours. Ceux qui ont eu le bonheur dentendre le prestigieux orateur se souviendront de cette admirable fête de lâme où lapôtre du spiritisme en une langue superbe a enlevé son auditoire jusquaux plus hautes cimes de la pensée humaine.
La carrière du propagandiste prend fin sur ce brillant succès. Léon DENIS a soixante quatre ans.
En 1907, dans LA TRIBUNE une polémique retentissante va le mettre en cause dans une discussion qui dérive vers des fins politiques.
Mais voilà quà trois années dintervalle, la provocation vient dun jeune écrivain qui signe du pseudonyme : Paul NORD. Il sautorise de certains passages du PROBLEME DE LÊTRE ET DE LA DESTINEE et prétend, de gré ou de force, enrôler le maître sous la bannière du Panmonisire. Léon DENIS proteste contre cet enrôlement forcé. Une mise au point définitive paraît, après plusieurs lettres dans la revue spirite de juillet 1910.
Peu de temps après, paraît LA GRANDE ENIGME ; Dieu et lunivers, suivi de la loi circulaire, les âges de la vie et la mission du XXème siècle.
Parmi les Pascal inquiets que hante linsoluble solution de LA GRANDE ENIGME, Monsieur Léon DENIS a toute la ferveur hautaine dun BOSSUET et de la persuasion doucement obstinée dun FENELON .
Cest dans ces termes que Monsieur J. J. BROUSSON présente louvrage dans le matin du 14 juillet 1911.
Dieu et lunivers... où et comment ai-je songé à écrire ce livre ?
Cétait un soir dhiver, un soir de promenade sur la côte azurée de Provence. Le soleil se couchait sur la mer paisible, les rayons dor, glissant sur la vague endormie, allumaient des teintes ardentes sur le sommet des roches et des promontoires, tandis que la mince croissant lunaire, montait dans le ciel sans nuages. Un grand silence se faisait, enveloppant toutes choses... Et la voix me dit : publie un livre que nous tinspirerons, un petit livre qui résume tout ce que lâme humaine doit connaître pour sorienter dans sa voie, publie un livre qui démontre à tous que la vie humaine nest pas une chose vaine dont on puisse user avec légèreté, mais une lutte pour la conquête du ciel, une uvre haute et grave dédification, de perfectionnement, une uvre qui régissent des lois augustes et équitables au-dessus desquelles plane léternelle Justice tempérée par lAmour .
Sur cette trame senchaînent les chapitres de ce livre qui est un hymne à léternel.
DIEU - LUNIVERS - LE LIVRE DE LA NATURE.
LA GRANDE ENIGME est suivi dune offensive menée par le clergé catholique. On essaye datteindre le spiritisme par le ridicule. Les témoignages du monde savant sinscrivent avec force contre une telle manière de voir et Léon DENIS ajoute :
La vérité est que dexcellents catholiques dans toutes les classes de la société, sont spirites. On rencontre nombre de prêtres, de religieux qui étudient cette science, assistent à des réunions et témoignent hautement de leur sympathie pour la doctrine et il cite des prélats illustres et il conclut après avoir démontré que les livres sacrés la vie des saints relèvent du spiritisme pur.
Consécutivement, une autre brochure détudes fut mise dans le commerce sous le titre de LAU-DELA ET LA SURVIVANCE DE LÊTRE, annexe aux deux gros ouvrages : DANS LINVISIBLE et LE PROBLEME DE LÊTRE.
Cest un raccourci suggestif, un tableau exact de la question de la survie.
Le temps na point épuisé son succès.
En 1913, la société détudes psychiques de GENEVE assume le deuxième congrès universel. Il souvre le 10 mai sous la présidence de Messieurs C. PIGUET, Léon DENIS et GABRIEL DELANNE qui partagent cette fonction.
Lordre du jour de la séance douverture a pour objet létude et la discussion du rôle du spiritisme dans lévolution religieuse de lhumanité : question épineuse !
Le dernier orateur inscrit, Monsieur PHILIPPE, avocat à la cour dappel de PARIS, démontre avec talent que le spiritisme ne saurait être une religion.
Léon DENIS intervient à son tour. Après avoir esquissé le problème de lorigine des religions, puis retracé à grands traits leur histoire, il étudie en particulier les phénomènes capitaux du christianisme, conclut :
Le spiritisme seul peut établir le rapport entre la science et la religion ; le spiritisme, seul, peut être le trait dunion entre les croyances et la science. Et par quel procédé ? En fournissant à lhumanité une vraie philosophie, une notion philosophique exacte et positive de la nature de lêtre, de son avenir et de la notion de lau-delà, par les faits, ce quaucune religion ne peut faire actuellement, et par ce procédé, il dissipe cette angoisse terrible qui pèse sur lesprit humain, langoisse de lavenir, langoisse de la vie après la mort que les religions ne peuvent guérir .
Au banquet qui réunit les congressistes dans la salle de PLAINPALAIS, le 11 au soir, le Maître sélève aux plus hauts degrés de léloquence, saluant lhospitalière Genève Cité splendide, grand foyer intellectuel européen .
De GENEVE Léon DENIS se rend à MARSEILLE en séance privée, puis à CHALLES en Savoie, à la demande de quelques amis.
Après un déplacement qui a duré trois mois cest la retraite (du moins le croit-il !).
Mais des jalousies plus ou moins masquées se font jour par instants. Il écrit donc le 28 novembre à Gabriel DELANNE :
Les dissentiments qui se sont élevés entre nous, au sujet de MILLER, et que je croyais apaisés, viennent de se réveiller avec une intensité nouvelle. Jai été, de la part de plusieurs membres du Conseil dadministration de la Société Française dEtude des Phénomènes Psychiques, lobjet dattaques violentes, injurieuses même, en différents journaux spirites et anti-spirites. Aucun désaveu ne sétant produit, il en résulte que ma situation à la tête e la Société est devenue impossible. Je vous prie donc de faire rayer mon nom comme président dhonneur. Cette résolution étant définitive et irrévocable, vous voudrez bien la communiquer au Conseil dadministration. Cest avec un profond regret que je me sépare dhommes, de frères, avec lesquels jai combattu longtemps pour une cause chère ; mais ma dignité, mon honneur sont en jeu, et en telle matière ma moindre hésitation serait une faiblesse. Jespère que cette décision naltérera en rien les sentiments damitié qui nous unissent et sous lempire desquels nous avons travaillé et nous travaillerons encore au progrès du Spiritisme dans le Monde. Dans cette pensée, je vous serre cordialement les mains .
Gabriel DELANNE, véritablement peiné, lui répond que rien ne justifie une telle rupture, que les divergences de vues à propos dun médium, ne peuvent les séparer.
Quoi quil arrive , lui dit-il en terminant, je ne reste pas moins votre ami et vous pouvez être assuré que nimporte quelle différence dopinion ne saurait altérer les sentiments affectueux qui nous unissent .
Ils ne devaient pas cesser de sestimer et de continuer parallèlement leur belle et noble tâche.
Cependant, la vue de Léon DENIS saffaiblit, lopération de la cataracte subie deux années auparavant namène aucune amélioration.
Il doit abandonner loutil qui lui reste : sa plume. Grâce à sa puissance de travail, à son goût de lordre, à sa mémoire incomparable, il vient à bout de sa besogne sans que personne nait à en souffrir.
Au début de lannée 1913, il tombe gravement malade. Heureusement, un traitement énergique le guérit de cette première pneumonie.
Depuis 1909, les séances du groupe de la RUE DU REMPART ont pris fin. Toutefois, les réunions continuent chez Madame FORGET. LEsprit Bleu et Jérôme sy communiquent régulièrement.
Au début de la grande guerre, lorsquen 1914 lordre de mobilisation paraît, Léon DENIS ressent une poignante affliction. Il part aux eaux de CHALLES et y emmène Madame FORGET.
Lannée suivante, leurs moyens dexistence sont des plus modestes, la guerre ayant fait augmenter subitement le coût de la vie. Léon DENIS sinstalle avec sa vielle amie dans un local plus vaste au n° 19 de la place des arts. Au cours de cette année, il obtient le concours inespéré dune secrétaire : Mademoiselle Claire BAUMARD qui restera aux côtés du Maître avec fidélité et un dévouement exemplaire jusqu'à sa mort.
Cependant, la guerre exerce ses ravages. Jérôme apporte ses messages au petit groupe, renseigne son fils sur les événements, léclaire et le rassure. Vers la fin de lannée 1916 Monsieur Jean MEYER vient trouver le Maître pour lui faire part de son intention dacquérir le revue Spirite qui depuis un an ne paraissait plus du fait de la guerre. Léon DENIS ne peut que le féliciter et lencourager. Reste à organiser lunion spirite française. Jean MEYER pressent Léon DENIS pour la présidence, mais celui-ci refuse pour les raisons de son éloignement de PARIS, de son âge, de ses infirmités ; néanmoins il accepte la présidence dhonneur.
Le 25 août 1917, la mort de sa vielle amie, son cher médium Madame FORGET le laisse isolé dans la ville bondée de troupes en partance et de soldats blessés.
LE MONDE INVISIBLE ET LA GUERRE paraît en 1919 : cest lensemble des articles publiés au cours des hostilités.
En 1920 il établit le bilan moral de laprès-guerre dans une suite de pages pénétrantes.
En 1921, il écrit une série darticles imprégnés dune poésie profonde et sereine sur la voix des choses et préconise le retour à la nature .
Lannée 1922 est consacrée au spiritisme dans lart et ensuite à de belles études sur les forces radiantes , lesquelles expliquent comment la vibration universelle raconte à lhumanité lhistoire des races, des mondes, car elle contient en elle toutes les formes du présent et du passé qui sont génératrices de celles de lavenir.
Après les communications de Jules FERRY et de Paul BERT, relatives à lenseignement populaire, cest la question sociale, dans ses rapports avec le spiritisme, qui absorbe lattention.
Lannée 1924 est entièrement consacrée à cette étude ; le socialisme que préconise Léon DENIS se confond avec celui de Jean JAURES, tout pénétré didéalisme et dun sentiment profondément humain. JAURES, souscrivant par avance aux conclusions du philosophe spirite sexprime ainsi :
Lunivers est une grande société de forces et dâmes qui, sollicitées entre le bien et le mal, aspirent du fond des contradictions et des misères à la plénitude et à lharmonie de la vie divine .
Cest la même année au mois davril que paraît THE MYSTERY OF JEANNE DARC par Sir Arthur CONAN DOYLE, le célèbre auteur de Sherlock Holmes ; cest la traduction de JEANNE DARC MEDIUM !
Une correspondance des plus cordiales entre les deux auteurs sen est suivie. Sir CONAN DOYLE présente lui-même Léon DENIS au public en ces termes :
Jaime et jadmire tant son livre que je désire vivement suivre le texte daussi près que possible. Lexposé de son sujet est si complet quil ne me reste plus rien à dire, si ce nest que je suis tout à fait convaincu quimmédiatement après le CHRIST, Jeanne DARC est sur la terre lêtre spirituel le plus élevé sur lequel nous avons des récits véridiques. On est enclin à sagenouiller devant elle .
Le troisième congrès spirite international de 1925 approche. Monsieur Jean MEYER demande à Léon DENIS daccepter la présidence. Son grand âge et ses infirmités le font refuser. Mais lesprit de Jérôme et celui dAllan KARDEC le pressent daller à PARIS et il se met au travail. Il trouve lhospitalité la plus affectueuse chez une ancienne secrétaire.
Du 6 au 13 septembre, pendant cette semaine laborieuse, il assume les devoirs de sa charge. Ce congrès réunit les représentants de 24 nations ; une soixantaine de journaux rend compte de ses séances.
Cétait un spectacle impressionnant dit le Maître, que de voir défiler à la tribune des hommes de toutes races et de toutes couleurs. Tous venaient affirmer, en des langues diverses, la même foi en la survivance et dans lévolution indéfinie de lêtre, dans lexistence dune cause suprême dont la pensée radiante anime lunivers. Des hommes éminents dans les sciences et dans les lettres tels que sir Oliver LODGE, sir Conan DOYLE, le procureur général MAXWELL, ont ajouté leurs adhésions formelles aux vibrants discours des orateurs. On sentait passer sur lassistance de souffle inspirateur dune foule invisible, et les voyants attestaient la présence de défunts illustres qui prenaient une part active à lélaboration dune grande uvre .
Le congrès a pour but de mettre en lumière le caractère scientifique du spiritisme expérimental, ainsi que la portée morale et sociale de la doctrine spirite dans le développement de la fraternité humaine.
Avec quel doigté, quelle aisance, quelle autorité le vieil apôtre, quasi aveugle, conduit ces important débats, veillant à ce que lordre du jour soit respecté !
Cest durant ce congrès quest scellée lamitié de Léon DENIS et de sir Conan DOYLE. Léon DENIS affectionne le grand romancier anglais pour le courage quil apporte à répandre, par lécrit et par la parole de la nouvelle révélation .
Rompant avec ses habitudes, le Maître accepte linvitation de Monsieur Jean MEYER, conviant les congressistes le 8 septembre rue Copernic. La veille du départ, un lunch dadieu est servi en lhonneur de Léon DENIS par les soins de son hôtesse, entre amis intimes dont Madame et Monsieur MEYER.
Il na pas voulu quitter PARIS sans rompre le pain de lamitié avec le pasteur Wautier DAYGALLIERS, professeur de théologie à la Sorbonne.
Le lendemain il reprend la route de TOURS emportant de son voyage limpression la meilleure.
Dès le mois suivant, il revient à son idée chère entre toutes, cette série darticles sur le celtisme parus dans la revue spirite dAllan KARDEC et auxquels le grand Initiateur lui-même collabore.
Léon DENIS, à 80 ans, commence LE GENIE CELTIQUE, son dernier ouvrage. Il est en pleine élaboration quand le jeune et ardent écrivain spiritualiste Gabriel GOBRON vient donner à TOURS une conférence à luniversité populaire. Il le reçoit à sa table, sentretient avec lui de louvrage en cours, imprime dans le cur du celte dArdennes , un sentiment dadmiration reconnaissante.
Dans un article de LEST REPUBLICAIN, Gabriel GOBRON salue le vieux druide de Lorraine qui en pays turon, au bord du Loyre Gaulois, ravive létincelle quon eut dit éteinte du celtisme immortel .
Quelques mois après, au cours de cet hiver qui devait être le dernier de sa vie terrestre, Monsieur A. RIPERT, le distingué secrétaire général de la revue spirite donne une conférence à TOURS. Il est lhôte du Maître.
En mars, LE GENIE CELTIQUE est terminé.
A tant de pages célèbres écrites à ce sujet, je naurais pas songé, dit-il, à ajouter quoi que ce soit, si je navais eu un élément nouveau à offrir aux lecteurs pour élucider le problème de nos origines, cest-à-dire la collaboration du monde invisible. En effet, cest à linstigation dAllan KARDEC que jai réalisé ce travail.
Nous sommes, nous, Français actuels, les descendants des Gaulois ; Latins par la culture, nous sommes Celtes par le sang .
Le premier chapitre est consacré à lIrlande, ancien sanctuaire des Druides. Il nous conduit au pays de Galles puis en Ecosse, en Bretagne et du rivage dArmor sur les hauts lieux de lAuvergne et le périple sachève en Lorraine au DONON et à SAINTE ODILE.
La seconde partie de louvrage traite du druidisme.
Jehanne de DOMREMY, lEsprit Bleu , une fois encore, vient bénir ces pages élevées à sa mémoire dans une pieuse et haute pensée.
Tel est ce maître livre tout palpitant encore de la foi de lapôtre, livre auquel les messages dAllan KARDEC et de Jehanne de DOMREMY ajoutent un caractère de sincérité émouvante.
Dans cet ouvrage son écriture revêt une forme absolument pure, dépouillée de tout ornement et qui est à la mesure exacte dune pensée vigoureuse parvenue à la sérénité.
Le jeudi 7 avril il salite.
Le 9 une pneumonie se déclare. Il conserve sa lucidité même si la maladie le mine rapidement.
Le mardi 12 avril il articule avec un calme impressionnant ses dernières paroles : Georgette , dit-il en sadressant à sa servante penchée à son chevet pour le soutenir, vous avez été à même de comprendre... si vous avez voulu. Vous savez ce que vous allez voir arriver, vous savez que ce qui a été écrit est lexpression de la vérité... de la vérité toute nue et il ajoute : Vous aurez à entendre des sarcasmes, mais cela doit vous être indifférent .
Quelques instants après, reprenant la parole pour la dernière fois, Léon DENIS prononce ces mots léguant à la postérité lexemple dun labeur poursuivi au seuil même de la tombe :
Il faut terminer, résumer et... conclusion (il faisait allusion à la préface de la biographie dAllan KARDEC que lui avait demandé Monsieur Jean MEYER) et il reprend : envoyer à MEYER le 15 . Ce sont ses ultimes paroles.
Les obsèques ont lieu le 16 avril. Il avait demandé un enterrement modeste, sans office. Cest le pasteur Wautier dAYGALLIERS qui vint faire la levée du corps.
Une foule respectueuse sest amassée place des Arts pour saluer ce grand vieillard. Des couronnes dimmortelles jaunes entourent le corbillard.
LA FIN DUN SAGE
On a fait peu de bruit autour de la mort de Léon DENIS. Pas assez. On jurerait que lhumanité sceptique en surface, mais toujours croyante au fond, tant sont puissants lénigme, lattrait et langoisse du mystère, hésite à honorer les derniers des sages qui cherchèrent à concilier la science et la foi. Comme si la paix et le progrès pouvaient refleurir sans le merveilleux appoint de lidéal.
Il faut réparer cette injustice.
La vie toute entière de Léon DENIS a été vouée à la survie. Plus que quiconque, il a nié lanéantissement total de lêtre pensant. Poète, sans doute, mais grand artiste méditatif, surtout, toujours il sest efforcé de prouver que ce nest point pour léternité que nous perdons les êtres qui nous sont chers et que leur invisible présence se manifeste à la fois à notre esprit, à notre cur, voire à nos sens, pourvu que nous nous défendions contre toutes forces doubli.
Chez lui, linspiration nexcluait point lesprit scientifique. Il se rencontrait avec sir William BARRETT qui proclamait que le spiritisme est sur le chemin qui mène à tout avancement des connaissances humaines.
Avec une douce obstination, alors que le psychisme paranormal se disputait les écoles divorcées du spiritisme, qui croit à la survivance de lentité humaine, et du métapsychisme, qui nadmet que des interactions des forces encore si mal définies des vivants, il a développé ses convictions dans des oeuvres qui font autorité et où le philosophe le dispute au savant : LAU-DELA ET LA SURVIVANCE, LE PROBLEME DE LÊTRE ET LA DESTINEE, LA GRANDE ENIGME, APRES LA MORT, LE POURQUOI LA VIE.
Jusqu'à lâge de 81 ans, où il sest éteint, persuadé de continuer au-delà, de collaborer à lévolution de lhumanité avec une assiduité à la fois plus énergique et plus sereine que celle quil déploya au cours de sa longue existence de saint laïque, Léon DENIS a été un émouvant exemple de fidélité à ses principes et dinépuisable bonté.
Et on ne peut que sincliner devant la mémoire de ce sage très digne qui disait des spirites : tant raillés et persiflés dont il fut le chef, après Allan KARDEC, aux côtés de Gabriel DELANNE, de Camille FLAMMARION, de William CROOKES et tant dautres savants incontestés : Ils ont eu ce mérite immense dattirer lattention de lhumanité pensante, non seulement sur un ensemble de faits qui révèlent lexistence de tout un monde invisible, vivant et sagitant autour de nous, mais aussi sur les conséquences philosophiques et morales découlant de ces faits. Celles-ci sont un acheminement vers la connaissance des lois éternelles qui régissent la vie, lévolution et assurent le fonctionnement de la justice dans lunivers .
Oeuvre Littéraire de Léon Denis
1880 : Tunis et l'Ile de Sardaigne (brochure)
Le Médecin de Catane (nouvelle)
Giovanna (nouvelle)
1885 : Le Pourquoi de la Vie
1889 : Après la Mort (dernière édition revue et corrigée : 1920)
1898 : Christianisme et Spiritisme (dernière édition revue et corrigée : 1920)
1901 : L'Au-delà et la Survivance de l'Etre (brochure)
1903 : Dans l'Invisible (dernière édition revue et corrigée : 1924)
1905 : Le Problème de l'Etre et de la Destinée (dernière édition revue et corrigée : 1922)
1910 : Jeanne d'Arc Médium (dernière édition revue et corrigée : 1926)
1911 : La Grande Enigme (dernière édition revue et corrigée : 1921)
1919 : Le Monde Invisible et la Guerre
1921 : Esprits et Médiums (brochure)
Synthèse doctrinale et pratique du Spiritualisme
La Spiritualisme et le Clergé Catholique
1924 : Socialisme et Spiritisme (Revue Spirite)
1924 : Jaurès Spiritualiste
La question Celtique et le Spiritisme