Bibliographie

"L'homme superlumineux" - Pr. Régis Dutheil et Brigitte Dutheil, Ed. Sand, 1990.

"L'Univers superlumineux" - Brigitte Dutheil, Ed. Sand, 1994.

 

Le prof. Régis Dutheil, désincarné au début des années 1990, est agrégé de physique et s'était consacré depuis 1983 à la recherche en physique fondamentale. Brigitte Dutheil, sa fille, est ancienne élève de l'Ecole Normale Supérieure, professeur de lettres classiques, et s'est spécialisée dans l'étude des problèmes d'histoire et de philosophie posés par la conscience et la mort. Nous avons appris par ailleurs que Brigitte Dutheil serait actuellement vice-présidente de l'USFIPES.

Ces ouvrages ont retenu notre attention, car ils traitent de l'hypothèse de l'existence d'une matière superlumineuse, intangible dans les conditions normales, et se déplaçant à une vitesse supérieure à celle de la lumière. En effet, les spirites connaissent depuis 1857, date de la 1° publication du Livre des Esprits, la validité de cette hypothèse car le fluide universel et le périsprit sont formés d'une telle matière :

93. L'Esprit, proprement dit, est-il à découvert, ou est-il, comme quelques-uns le prétendent, environné d'une substance quelconque ?

" L'Esprit est enveloppé d'une substance vaporeuse pour toi, mais encore bien grossière pour nous ; assez vaporeuse cependant pour pouvoir s'élever dans l'atmosphère et se transporter où il veut. "

94. Où l'Esprit puise-t-il son enveloppe semi-matérielle ?

" Dans le fluide universel de chaque globe. C'est pourquoi elle n'est pas la même dans tous les mondes ; en passant d'un monde à l'autre l'Esprit change d'enveloppe, comme vous changez de vêtement. "

En ce qui concerne la vitesse de déplacement des esprits errants, elle est manifestement supérieure à celle de la lumière (mais pas forcément infinie) :

89. Les Esprits mettent-ils un temps quelconque à franchir l'espace ?

" Oui, mais rapide comme la pensée. "

Dans cette petite analyse, nous parlerons surtout du premier ouvrage cité, car le second en reprend de nombreux éléments.

Les auteurs commencent par une étude historique des diverses philosophies sur les notions de conscience, de la réalité et de sa perception (rationnelle et non rationnelle), ainsi que de la méthodologie scientifique.

Ils énumèrent des faits tendant à remettre en question l'actuel paradigme (modèle) scientifique sous-lumineux, parmi lesquels :

- la synchronicité ou "occurrence simultanée de deux événements liés par le sens et non par la cause" (définition donnée par C. G. Jung) ;

- le paradoxe EPR, repris par l'expérience plus récente du physicien Aspect, montrant qu'entre deux photons "corrélés" il existe un lien dont l'effet ne semble pas limité par la vitesse de la lumière.

Ils introduisent alors leur théorie selon laquelle la conscience possède une réalité matérielle, d'un champ de matière différent de ceux qui sont actuellement connus, mais qui interagit avec eux. Ils la renforcent par des observations sur les sensations de l'être humain, faisant intervenir une phase non repérable dans l'organisme (qui semble transiter par le périsprit et l'Esprit), ainsi que par d'autres expériences neurophysiologiques, notamment celles de John Eccles, prix Nobel de 1963. Selon les auteurs, la conscience, formée de matière superlumineuse, ferait fonctionner l'organisme humain par l'intermédiaire du cortex cérébral.

Cette théorie est comparée à celle de divers scientifiques :

- celle des "mindons" ou particules mentales de Firsoff ;

- celle des "psitrons" de Dobbs, qui a repris les hypothèses de Feinberg et Sudarshan datant de 1966 ;

- la théorie holographique de Pribram, selon laquelle notre cerveau fonctionnerait de manière holographique, percevant les objets du monde physique en interprétant des fréquences en provenance d'une autre dimension qui transcende le temps et l'espace. De plus, le cerveau aurait deux modes de fonctionnement : l'un normal, local et spatio-temporel, l'autre plus rare, non local, avec établissement de corrélations, qui nous ferait percevoir les synchronicités (on peut mesurer ici le grand niveau d'abstraction de cette théorie, où il devient très difficile de distinguer le réel de l'irréel).

Les auteurs notent que les particules mentionnées n'ont pas encore pu être mises en évidence expérimentalement. Mais les expériences se poursuivent, et de récentes découvertes sur la propagation de la lumière dans les fibres optiques semblent confirmer l'existence de photons évanescents allant plus vite que la lumière.

Un modèle mathématique détaillé a été élaboré par l'auteur par analogie à celui de la relativité générale d'Einstein, mais le détail n'est pas repris dans les livres cités qui n'en abordent que les conséquences scientifiques et philosophiques. A l'image du mur du son en aéronautique, il existerait un "mur de la lumière", séparant l'univers sous-lumineux (le monde tangible) et l'univers superlumineux. Dans l'univers superlumineux, il serait possible d'observer un événement avant sa cause, ce qui remet en cause la loi de causalité liée à l'écoulement du temps (la cause précède l'effet).

Or, selon la Doctrine Spirite, la loi de causalité est un principe fondamental, qui est également valable dans l'univers superlumineux, que nous pouvons appeler le monde des Esprits. De même, le "mur de la lumière" nous semble plutôt une sorte de mur multiple, à sens unique, car s'il empêche (dans les conditions normales) les hommes de percevoir le monde des Esprits, il n'empêche nullement les Esprits errants de percevoir les hommes. De même, les Esprits inférieurs ne perçoivent pas normalement les Esprits plus évolués, et le modèle présenté ne semble pas prendre en compte les divers états possibles du périsprit, plus ou moins dense selon le degré d'évolution de l'Esprit. Il nous semble donc insuffisant d'extrapoler la théorie de la relativité pour décrire le monde des Esprits : il faudrait plutôt rechercher une nouvelle théorie qui l'englobe, comme la théorie de la relativité englobe et complète la théorie newtonienne.

De même, selon la théorie présentée par les auteurs, "il y aurait pour un être vivant dans l'univers superlumineux une instantanéité complète de tous les événements constituant sa vie, les notions du passé/présent/futur disparaîtraient". En ce qui concerne le futur, ceci est loin d'être confirmé par les communications des Esprits, en particulier de ceux qui sont encore imparfaits. Citons le Livre des Esprits :

243. Les Esprits connaissent-ils l'avenir ?

" Cela dépend encore de la perfection ; souvent ils ne font que l'entrevoir, mais il ne leur est pas toujours permis de le révéler ; quand ils le voient, il leur semble présent. L'Esprit voit l'avenir plus clairement à mesure qu'il se rapproche de Dieu. Après la mort, l'âme voit et embrasse d'un coup d'oeil ses émigrations passées, mais elle ne peut voir ce que Dieu lui prépare ; il faut pour cela qu'elle soit tout entière en lui après bien des existences. "

Une autre conséquence de la théorie superlumineuse est que, contrairement à notre monde physique où, suivant la loi d'entropie, le désordre augmente en permanence, dans le monde superlumineux l'ordre augmente en permanence, l'entropie diminue, les états d'information et de signification augmentent sans cesse. Selon les auteurs, un principe d'information maximum remplacerait le principe de causalité temporel du monde physique.

Ce principe semble en accord avec la loi d'évolution. En effet, les Esprits parlent de leur état ou de leur niveau d'évolution, et pas de leur âge (le temps n'ayant pas la même signification que lorsqu'ils sont incarnés).

Toujours selon la théorie superlumineuse, certaines antiparticules produites temporairement lors de collisions entre particules, seraient des tachyons ayant franchi brusquement le mur de la lumière en devenant sous-lumineux. Soulignons en passant qu'il est faux de déduire de cela que les Esprits seraient constitués d'anti-particules, hypothèse erronée que l'on rencontre quelquefois dans des ouvrages spirites.

Les auteurs expliquent les interactions entre les mondes superlumineux et sous-lumineux par la mécanique ondulatoire, qui montre qu'à toute particule superlumineuse est associée une onde de phase sous-lumineuse par un phénomène de battement, et vice versa. Les deux univers seraient ainsi étroitement intriqués l'un dans l'autre.

Le déterminisme et le libre arbitre existeraient simultanément, respectivement dans l'univers matériel et dans l'univers superlumineux. Cette interprétation semble correcte dans la mesure où le libre-arbitre est un attribut de l'être intelligent, qui est l'esprit. Toutefois, les spirites savent que cette position est à nuancer en fonction de l'évolution entre les différents règnes. Si le déterminisme est complet pour les minéraux et les végétaux, il se réduit progressivement dans le règne animal et plus encore chez l'homme, en raison du développement du libre arbitre.

Dans la deuxième partie de l'ouvrage, les auteurs font une étude historique de la conception de la mort et de l'au-delà par l'homme et les diverses religions, puis rapportent les études faites par Elisabeth Kübler-Ross, Raymond, Moody, Kenneth Ring et Michael B. Sabom sur les phénomènes qui accompagnent la mort et les témoignages aux frontières de la mort (NDE).

Puis, ils font un essai d'interprétation des diverses étapes des NDE (onze selon Moody) en fonction de leur théorie. En voici quelques exemples :

- l'incommunicabilité, où le sujet éprouve des difficultés pour exprimer son expérience avec le langage humain, lié aux propriétés spatio-temporelles différences dans l'univers superlumineux ;

- l'audition du verdict par les médecins qui est perçue par le patient, les auteurs faisant remarquer que les sensations visuelles et auditives sont perçues directement par le moi superlumineux (ou l'Esprit, ce que confirme la doctrine spirite) ;

- la paix et le bien-être, le moi superlumineux (Esprit) étant temporairement libéré de l'organisme souffrant et du désordre sous-lumineux ;

- le passage du tunnel, interprété comme le passage du "mur de la lumière" ;

- la décorporation, où la conscience du patient perçoit les premiers effets de l'univers superlumineux, mais est encore imprégné de particules lumineuses (photons et neutrinos) ;

- la rencontre d'autres êtres et l'entrée dans la lumière, que les auteurs interprètent comme la perception d'hologrammes par la conscience, d'images idéalisées d'objets sous-lumineux qui seraient, selon les auteurs, irréels.

Sur ce qui se passe après la mort, les auteurs s'expriment prudemment car ils considèrent que cela est inaccessible ou inconcevable pour notre monde sous-lumineux. Au chapitre 9, les auteurs décrivent certains phénomènes paranormaux (apparition de fantômes, dédoublements, rêves), et parlent du spiritisme page 176. A la lecture de ce chapitre, il apparaît clairement que les auteurs n'avaient, du moins à l'époque de la rédaction de l'ouvrage, qu'une connaissance très insuffisante du sujet, et qu'ils avaient même un préjugé négatif sur le spiritisme. D'un côté, on ne pourra pas les soupçonner de s'être inspirés de la doctrine spirite pour élaborer leur théorie, mais de l'autre, on peut regretter qu'ils n'aient pas pu profiter de l'enseignement des Esprits pour guider leur travail et leur éviter des détours.

De même, les objections avancées contre la réincarnation, au chapitre 10, (augmentation de la population terrestre, pluralité des mondes habités etc.) ont reçu depuis belle lurette des réponses logiques et péremptoires. Les auteurs avancent que les vies antérieures pourraient être simultanées avec la vie actuelle compte tenu de l'inexistence du temps dans l'univers superlumineux. Cette interprétation ne résiste pas à l'observation des faits : selon la loi d'évolution, les Esprits évoluent au fur et à mesure des incarnations, qui ne peuvent donc être simultanées.

Le second ouvrage, "L'univers superlumineux", publié 4 ans plus tard (après la désincarnation du Prof. Régis Dutheil), reprend de nombreux éléments du premier. Même si l'on peut noter un très léger progrès, on y retrouve les mêmes préjugés négatifs et le manque de connaissance en ce qui concerne la réincarnation et le spiritisme, par une approche très superficielle et fausse sur certains points.

L'ouvrage est une quête d'éléments historiques, philosophiques, religieux, médicaux et même ésotériques en faveur de l'immortalité. L'auteur va jusqu'à affirmer que "la connaissance (non pas l'érudition mais la connaissance ésotérique) constitue le véritable moyen d'accès à l'univers superlumineux". Nous ne commenterons pas dans la Revue Spirite les arguments ésotériques, concernant les symboles, le Graal, l'alchimie, le grand oeuvre etc. que la doctrine spirite relègue comme des croyances d'un temps où la raison n'avait pas atteint un niveau suffisant. Le Spiritisme ne fait appel à aucune doctrine secrète, ancienne ou réservée à des initiés. Il n'utilise que des arguments clairs et simples, à la portée de tous, basés sur une observation directe et faisant appel au bon sens et à la raison.

A noter dans le livre une confusion entre le christianisme et les conceptions des religions traditionnelles (Catholique, Protestante) : les dogmes de la résurrection, du jugement dernier etc. sont attribués à tous les chrétiens.

Au chapitre 6, l'auteur rappelle opportunément divers éléments biologiques liés à la vie, partiellement déjà signalés par Gabriel Delanne, Claude Bernard et d'autres chercheurs, et qui tendent à démontrer l'existence d'un champ organisateur superlumineux (l'Esprit et le périsprit pour les spirites).

Le chapitre sur les NDE est enrichi par des éléments du Dr. Melvin Morse, qui a démontré qu'une excitation électrique de la scissure de Sylvius, zone du cerveau située au-dessus de l'oreille droite, détermine les sorties hors du corps. Toutefois, la conclusion tirée que ce serait le foyer de l'âme nous semble un peu rapide...

Dans la conclusion du premier ouvrage, les auteurs affirment (nous ne doutons pas de leur bonne foi) que l'association de la conscience à une matière différente est une idée nouvelle. Même si les spirites savent que les auteurs mentionnés ont plus de 140 ans de retard sur ce point, nous devons les féliciter pour leur travail théorique remarquable, qui est une pierre de plus apportée à l'édifice de la connaissance humaine. Ils ont le grand mérite de bousculer le paradigme actuel de la science, profondément matérialiste, en y apportant une vision spiritualiste.

Le Spiritisme n'a d'ailleurs absolument rien à craindre de toutes les recherches et théories élaborées sur les phénomènes dits paranormaux. Bien au contraire, les observations faites par les chercheurs sur les NDE ne font que confirmer divers points de la doctrine spirite, transmis par les esprits au siècle dernier. Elles constituent ainsi une admirable convergence de preuves en faveur de la doctrine spirite, qui fournit des explications théoriques bien plus logiques, complètes, consolatrices que celle des scientifiques encore matérialistes, qui attribuent tout au cerveau, tout en avouant ne pas savoir exactement comment ce dernier fonctionne...

Ernest Bozzano, dans son ouvrage "A propos de la métapsychique humaine", chapitre XI, écrivait en 1926 que "les facultés rationnelles de l'homme (...) sont souvent obscurcies par le brouillard des idées préconçues et par le misonéisme qui caractérise surtout les hommes de science ; misonéisme qui rend ces derniers toujours prêts à accueillir toute hypothèse gratuite et absurde s'harmonisant avec leurs préjugés, et à répudier aveuglément une vérité manifeste et incontestable, si celle-ci contraste avec ces préjugés invétérés."

Ainsi, ces scientifiques matérialistes font tout pour rejeter a priori l'hypothèse spiritualiste, par crainte de se remettre en cause ou de se laisser fasciner par les croyances religieuses. Ils négligent ainsi la connaissance religieuse qui, lorsqu'on la débarrasse des erreurs, des superstitions et des absurdités introduites par l'homme, laisse apparaître des révélations et des messages originaux très profonds et logiques, confirmant les aspects actuels de la connaissance scientifique. Comme l'a dit Joseph Mazzini (cité par Ernest Bozzano), "la Vérité est un prisme à plusieurs faces, et l'erreur consiste à en contempler quelques-unes, en se figurant qu'on les contemple toutes".

C'est pour cela que le Spiritisme, tel que codifié par Allan Kardec, couvre et allie à la fois les trois aspects de la connaissance, qui sont la connaissance scientifique, la connaissance philosophique et la connaissance religieuse. Il est normal que, parmi les spirites ou groupes spirites, il en est qui se dédient plus particulièrement à l'un ou à l'autre de ces aspects, selon leurs aptitudes et leurs préférences. C'est l'union libre et fraternelle des spirites et des groupes autour du même idéal qui assure la complémentarité de l'ensemble du Mouvement Spirite. Par contre, lorsqu'un groupe ou une personne, même se disant spirite, s'affirme nettement opposé à l'un de ces aspects, il s'oppose par cela même au Spiritisme, néologisme clairement défini par Allan Kardec.

Rappelons aussi l'affirmation d'Allan Kardec, dans le "Caractère de la Révélation Spirite", que "le Spiritisme, marchant avec le progrès, ne sera jamais débordé, parce que, si de nouvelles découvertes lui démontraient qu'il est dans l'erreur sur un point, il se modifierait sur ce point ; si une nouvelle vérité se révèle, il l'accepte." A ce jour, nous n'avons connaissance d'aucune objection irréfutable de l'un des points fondamentaux de la Doctrine Spirite. Au contraire, toutes les découvertes scientifiques n'ont fait que confirmer cette doctrine depuis sa codification par Allan Kardec. Mais cela ne veut pas dire que les spirites doivent rester statiques, de grands progrès restent à réaliser, notamment dans le domaine médical.

Nous terminerons par les paroles d'Allan Kardec dans la note de bas de page qui suit la citation ci-dessus : "devant des déclarations aussi nettes et aussi catégoriques que celles qui sont contenues dans ce chapitre, tombent toutes les allégations de tendance à l'absolutisme et à l'autocratie des principes, toutes les fausses assimilations que des gens prévenus ou mal informés prêtent à la doctrine."