CHAPITRE 6
-
35 faits médiumniques

  • Ils furent tous tellement saisis qu'ils se demandaient les uns aux autres : "Qu'est-ce que cela? Voilà un enseignement nouveau, plein d'autorité ! Il commande même aux esprits impurs et ils lui obéissent !"
  • (Marc, 1-27)

    Euripide Barsanulfo, intermédiaire des esprits élevés, guérissait des maladies qui étaient, à l'époque, un défi pour la médecine, comme la lèpre et la tuberculose qui décimaient annuellement des milliers de vies dans le pays...

    Par ces guérisons, sa renommée s'étendit au-delà de la région : La petite ville de Sacramento était devenue célèbre. Quotidiennement, des centaines de malades, la plupart sans ressources, y arrivaient dans de vieux chars à boeufs, ou sur le dos de bêtes de somme... Avec l'afflux de la population ambulante et la surcharge des rares hôtels, les pensions se multipliaient et des chefs de famille compatissants abritaient les malades dans leur résidence.

    Evidemment, le clergé, voyant le peuple étranger rechercher le médium plutôt que l'église, redoubla de fureur dans sa campagne contre le Collège Allan Kardec et le Groupe Spirite "Espoir et Charité". Pourtant, des béats et même des prêtres gagnèrent de l'argent aux dépens du médium. C'est le cas du jeune prêtre Pedro Ludovico de Santa Cruz, de la paroisse et de l'ancien Lycée de Sacramento, ancien ami puis ennemi inflexible d'Euripide, qui bâtit d'innombrables maisons rapidement transformées en pensions...

    Lettre d'Euripide adressée à Zenon Borges.

    L'apôtre était alors à l'apogée de son travail médiumnique et se reposait peu. Dans une lettre adressée à Zenon Borges, son ancien élève qui était devenu professeur au Collège Allan Kardec, Euripide écrivit :

    Enfin, il m'est permis de vous adresser une lettre. Vous ne vous rendez pas compte, mon cher Zenon, combien je suis affairé et combien mon travail augmente de jour en jour. Que voulez-vous, la moisson est abondante et les ouvriers peu nombreux !

    A cette époque, Euripide partageait son temps entre la pharmacie, le groupe spirite "Espoir et Charité" et le Collège Allan Kardec, où les malades désespérés le recherchaient parfois.

    Une caractéristique de sa médiumnité était qu'il n'examinait pas les malades, ni même l'apparence des affections externes. Il ne demandait que l'âge du malade, puis il écrivait machinalement l'ordonnance par psychographie. Amália Ferreira et ses collaborateurs préparaient alors les médicaments sous la supervision des esprits.

    Les guérisons obtenues par Euripide n'étaient malheureusement pas répertoriées en ce temps, ni même les interventions chirurgicales.

    Toutefois, j'ai recensé plusieurs faits authentiques, rapportés par des témoins oculaires ou des personnes guéries par l'inoubliable médium. Les faits qui me sont parvenus par des tiers n'ont pas été pris en compte...

    Mais avant de divulguer ces témoignages historiques (inédits), je voudrais insister sur un détail important. En effet, lorsque l'esprit de l'apôtre quittait son corps physique (phénomène de dédoublement), il était capable de réaliser seul des guérisons, des interventions chirurgicales et des accouchements. Cela s'explique par le fait qu'Euripide, dans l'une de ses dernières incarnations, avait été médecin en France. Sans le dédoublement, les guérisons dépendaient du Docteur Bezerra de Menezes, l'un de ses guides spirituels. Cela dit, voici les faits médiumniques anthologiques, tels qu'ils m'ont été transmis : Des cas de guérisons, de chirurgie, d'accouchements, de prémonitions, de clairvoyance, de dédoublement, de psychographie, d'effets physiques, etc..

    Premier cas d'obsession.

    Dans la cave du Collège Allan Kardec, Euripide Barsanulfo avait fait aménager des chambres avec des grilles en fer où logeaient les obsédés dangereux, que la majorité des psychiatres considérait alors comme des "fous", les symptômes psychologiques ressemblant à ceux de la folie par lésions cérébrales. Ces malheureux étaient internés dans des hospices, et comme ils étaient violents, leurs familles les amenaient à Sacramento enchaînés et escortés par des soldats. Le traitement spirituel était administré le soir, après les activités scolaires. Euripide Barsanulfo et les médiums assistants amenaient alors les obsédés dans le grand salon, puis, sous l'orientation de l'esprit de Bezerra de Menezes, ils les guérissaient par des passes, par l'enseignement de la doctrine et par la prière.

    Euripide Barsanulfo était un "homme magnétique". Ses fluides, alliés au sentiment d'amour du prochain, réalisèrent des prodiges dans les cas d'obsession, dont voici quelques exemples :

    Un jour, un homme petit mais doté d'une force herculéenne et armé d'un couteau, menaçait ceux qui tentaient de s'approcher de lui.

    - J'ai un couteau ! J'ai un couteau ! criait-il, les yeux hagards.

    Il fallut six hommes pour le dominer. Ils lièrent ses poignets avec de gros fils de fer, le conduisirent aux portes du Collège Allan Kardec et sollicitèrent l'aide d'Euripide Barsanulfo.

    - Regardez-le, professeur ! Il est devenu fou !

    - Lâchez-le, dit le médium.

    - Mais, il est furieux !

    - Il n'y a pas de danger.

    Les six hommes retirèrent les fils de fer et reculèrent immédiatement. Euripide s'approcha alors de lui et lui appliqua des passes magnétiques. L'obsédé, les yeux sortant des orbites, ne réagit pas : il commença à transpirer et se calma. Après les passes, Euripide prit son bras et conduisit le malheureux jusqu'à la cave du collège pour le traitement qui allait bientôt le guérir.

    De tels faits se produisaient souvent avec Euripide, et la majorité de la population de Sacramento y assistait.

    Deuxième cas d'obsession.

    Un homme vint habiter à Sacramento et devint très vite populaire. Il avait la curieuse manie d'écrire son prénom (Pierre) en grandes lettres sur les murs des résidences, au charbon. Une autre manie non moins curieuse est que, sans talent, il improvisait des vers pour les passants :

    Aujourd'hui j'ai eu une nouvelle
    Qui pour moi est très belle ;
    Le fils de la voisine
    A besoin d'une côte...

    Mais lorsque les esprits le tourmentaient, il devenait agressif et avait une force démesurée. Il déclencha la première bagarre devant la mairie, et fit face à plusieurs soldats, qui ne purent le dominer. On appela Euripide Barsanulfo qui, à la surprise générale, conduisit tranquillement Pierre jusqu'à la cave du Collège.

    Travail chirurgical d'Euripide sur le bras de son ancien élève Manoel Borges.

    Troisième cas d'obsession.

    C'est un cas typique. Arlindo Gomide (oncle de Jerônimo Cândido Gomide, fondateur de Palmelo) était fermier à Sacramento. Un jour, des problèmes amoureux lui ouvrirent les portes de l'obsession et il décida de se suicider. Il ingéra une grande quantité de tartre émétique et, dans une crise convulsive, il prit le revolver et la carabine et se mit à tirer des coups de feux en criant. Son neveu Jerônimo s'empressa de prévenir Euripide.

    - Allons-y, dit le médium.

    - Non, répliqua Jerônimo. L'oncle tire dans toutes les directions et nous pouvons mourir, professeur !

    - Allons-y, répéta Euripide. En les voyant arriver, Arlindo visa et tira.

    - Allons-nous en, insista Jerônimo.

    - Avance avec moi, répondit Euripide.

    Déjà proche d'Arlindo, le médium dit calmement :

    - Lâchez l'arme, monsieur Arlindo.

    Puis, il mit la main sur le front de l'obsédé et pria. Arlindo, les yeux vitreux, laissa immédiatement tomber la carabine. Euripide l'amena alors à la pharmacie où il injecta une forte dose de lait dans son estomac à l'aide d'une sonde et lui fit vomir le tartre émétique.

    L'élève et l'oiseau volé.

    Euripide tombait fréquemment en transe, dans la cour du collège ou en pleine salle de classe. Ses paupières se fermaient, son visage pâlissait, la sueur coulait et... son esprit se libérait ! Les élèves, habitués au phénomène, attendaient silencieusement que le professeur rouvre les yeux et raconte ce qu'il avait vu ou ce qu'il était allé faire en ville en tant qu'esprit : une guérison, un accouchement ou vérifier pourquoi tel élève malin avait fui le collège.

    Je vais mentionner deux cas d'élèves, rapportés par Antenor Germano da Silva1, le fameux Cristino, et qui montrent l'habileté d'Euripide avec les enfants.

    Dans son enfance, un passe-temps favori de Cristino était de chasser les oiseaux. Un jour, il découvrit dans l'un des pruniers du collège un nid de sabiá2. La tentation d'attraper l'oiseau était grande, mais Cristino y résistait car chaque matin, Euripide se rendait au pied de l'arbre pour écouter l'harmonieux gazouillement... Mais quelques jours plus tard, Cristino vit que le sabiá avait un petit, et souriant, il décida de le retirer du nid et de l'emmener chez lui. Il revint rapidement au collège. En arrivant, Euripide se rendit comme d'habitude jusqu'au prunier, où il vit que le sabiá était nerveux, gazouillait et sautait de branche en branche... De loin, Cristino observait la scène en pensant : "Le professeur se serait-il aperçu de quelque chose ?" Il se mêla aux autres enfants. Mais dans la salle de classe, dès que les élèves s'assirent, Euripide appela Cristino et dit :

    - Ne sauriez-vous pas, monsieur Cristino, pourquoi le sabiá de la cour a cessé de chanter ?

    - Je ne sais pas, monsieur Euripide...

    - L'un de mes élèves a grimpé sur le prunier et pris le petit sabiá... le pauvre... il doit avoir faim ! Sa mère est très affligée... Ne savez-vous pas qui a fait cela ?

    - Je ne sais pas, monsieur Euripide... Je ne sais pas...

    - Vous devez le savoir, monsieur Cristino... L'élève qui a fait cela devrait avoir la bonté de remettre le petit sabiá dans le nid afin que ses parents puissent l'élever.

    - C'est vrai, monsieur Euripide...

    - Aimeriez-vous, monsieur Cristino, que l'on vous enlève à vos parents pour vous emmener dans une autre ville ?

    - Non, monsieur Euripide...

    - Alors ramenez le petit sabiá, conclut Euripide avec amour.

    Cristino rapporta l'oiseau en pensant : "Personne ne trompe le professeur ! Il est parfois à deux endroits en même temps ! Il voit à travers les murs... Il sait tout ce qui se passe au collège !"

    La fugue de deux élèves.

    Au lieu d'aller aux cours, Cristino se promenait parfois à la campagne. Un mercredi, jour où Euripide enseignait la religion et la morale de dix à douze heures, il était allé avec Nestor Novelino jusqu'à une grande prairie appelée Curtume, où l'herbe poussait en formant comme des souches. Ils y entendirent quelques bruissements et Cristino dit :

    - Ecoute, ce sont des porcelets ! On les tue ?

    Ils jetèrent des cailloux vers les souches jusqu'à ce que de l'une d'elles surgisse une truie avec plusieurs porcelets... La truie, furieuse, courut en appelant ses petits et passa dangereusement sous une clôture de fil de fer barbelé. Nestor en fit autant, mais Cristino déchira l'ourlet de son pantalon... Les porcelets s'enfuirent et les deux garçons se rendirent aux berges du ruisseau Borá. Plusieurs canards nageaient... mais l'horloge de la paroisse était sur le point de sonner midi, et ils décidèrent de rentrer au collège. Cristino trouva un morceau de fil de cuivre et "cousit" le pantalon de l'intérieur. Il entra discrètement avec Nestor dans la salle alors qu'Euripide tournait le dos aux élèves.

    - Où sont messieurs Cristino et Nestor ? demanda le médium en se retournant subitement.

    - Nous sommes là, monsieur Euripide, répondirent-ils en levant le bras.

    - Avez-vous aimé le cours d'aujourd'hui ?

    - Il a été excellent, s'exclama Cristino.

    - Vraiment très bien, ajouta Nestor.

    - Je dois pourtant vous dire que sans sortir de cette salle, j'ai vu deux de mes élèves à la prairie du Curtume poursuivant et jetant des pierres sur une truie et cinq petits. Pour sauver sa lignée, elle a dû passer sous une clôture de fil de fer barbelé... Monsieur Nestor, savez-vous qui étaient ces élèves ?

    - Je ne sais pas.

    - Et vous, monsieur Cristino ?

    - Je ne sais pas non plus, professeur Euripide.

    - Eh bien ! Venez donc sur l'estrade et montrez votre pantalon...

    - Mais pourquoi, professeur Euripide ?

    - Je veux voir comment vous l'avez raccommodé avec le fil de cuivre que vous avez trouvé...

    Cristino et Nestor baissèrent la tête, et l'apôtre ajouta, affable :

    - Rappelez-vous que je serais toujours là où sera l'un de mes élèves... Ne vous enfuyez plus du collège...

    Cristino chuchota à Nestor : "Comment peut-il donc être à deux endroits en même temps ?"

    Vision prémonitoire du Traité de Versailles.

    Euripide Barsanulfo avait prévu à l'avance la première guerre mondiale, déclenchée en août 1914. En octobre 1918, voyageant dans l'état de Minas Gerais, il apprit ce qu'alors aucun chef d'état ne soupçonnait : la fin de la guerre. En voici le récit. Le médium donnait un cours et soudain, il entra en transe et vit, dans la célèbre Galerie des Glaces du Château de Versailles, le Traité de Paix signé par des chefs politiques, signatures qu'il put lire : Clémenceau, Wilson, etc.. En ouvrant les yeux, Euripide, ému, raconta aux élèves ce qu'il avait vu.

    - Grâce à Dieu, le monde sera bientôt en paix ! Attendons.

    Huit mois plus tard, le 28 Juin 1919, le Traité de Paix fut signé dans la Galerie des Glaces, au Château de Versailles...

    Accouchement médiumnique (et bilocation).

    Un jour, après une transe au milieu d'une leçon, Euripide dit en souriant :

    - Ecoutez-moi bien. Je reviens d'une maison derrière l'église du Rosaire, où j'ai fait un accouchement difficile. Le mari ne sait pas encore qu'il est père. Il est sur le chemin de l'école, à cheval, avec des habits de cavalier. A présent, il descend du cheval devant le collège. Il gravit les marches de l'escalier. Lorsqu'il entrera dans la salle, vous vous lèverez et vous vous rassiérez. Attention... Il va entrer...

    L'homme, avec un chapeau et des habits de cavalier, entra très inquiet en demandant à Euripide d'aller faire l'accouchement d'urgence car sa femme se sentait mal.

    - Calmez-vous, répondit le médium en souriant. J'ai fait l'accouchement il y a cinq minutes...

    - C'est impossible, monsieur Euripide. Il y a cinq minutes, je vous aurai vu en chemin.

    - Vous ne m'avez pas vu, parce que j'y suis allé en tant qu'esprit. Mais moi, je vous ai vu. Vous pouvez rentrer chez vous en paix. Vous avez une petite fille belle et forte.

    Mais l'homme, sceptique et craignant pour la vie de sa femme, emmena Euripide... L'accouchée avait la petite fille à ses côtés et en voyant le médium elle s'exclama :

    - Ce n'était pas la peine de revenir, monsieur Euripide... Le bébé et moi allons très bien !

    Euripide retourna au collège pour reprendre le cours interrompu.

    Ce phénomène n'est simple qu'en apparence. En effet, comment était-il possible que le périsprit, c'est-à-dire le corps spirituel d'Euripide Barsanulfo, ait pu devenir tangible au point que l'accouchée crût qu'il s'agissait du corps physique ?

    Allan Kardec affirme que "Par sa nature et dans son état normal, le périsprit est invisible, ... ; mais il peut aussi ... subir des modifications qui le rendent perceptible à la vue, soit par une sorte de condensation, soit par un changement dans la disposition moléculaire ; c'est alors qu'il nous apparaît sous une forme vaporeuse. La condensation (il ne faudrait pas prendre ce mot à la lettre, nous ne l'employons que faute d'autre, et à titre de comparaison), la condensation, disons-nous, peut être telle, que le périsprit acquière les propriétés d'un corps solide et tangible, mais il peut instantanément reprendre son état éthéré et invisible".

    Mais pour que le périsprit puisse acquérir les propriétés d'un corps solide, les fluides d'un médium sont nécessaires. Voici ce que dit le codificateur3 :

    L'esprit apparaît quand "il met son périsprit dans l'état nécessaire pour le rendre visible ; mais pour cela sa volonté ne suffit pas, car la modification du périsprit s'opère par sa combinaison avec le fluide propre du médium" ;

    D'où Euripide obtenait-il ces "fluides propres du médium" (fluides animalisés) ? A l'exemple des désincarnés, son esprit avait-il besoin d'un médium ? Oui, mais il produisait vraisemblablement lui-même les fluides indispensables à la tangibilité et donc au phénomène de la bicorporéité (son cas), vu qu'Euripide était aussi médium à effets physiques. C'est un point à méditer avec attention.

    Les jumelles.

    Notre médium, souriant, répondit à un homme qui était venu l'appeler pour faire l'accouchement de son épouse :

    - Vous m'appelez pour aider deux petites filles à venir au monde ?

    - Oh, monsieur Euripide, ne plaisantez pas ! Deux petites filles ? Je ne peux même pas en nourrir une...

    Euripide fit alors l'accouchement de deux très belles petites créoles aux yeux vifs...

    Le médium devint parrain de l'une des jumelles.

    Autre accouchement médiumnique.

    Voici encore un cas d'accouchement réalisé pendant un dédoublement.

    Un jour, on appela Euripide pour un accouchement à la ferme Gameleira, à douze kilomètres de Sacramento. L'accouchée était madame Ana da Costa, épouse du fermier Manoel Januário da Costa. Pour l'accompagner dans ce voyage, Euripide invita son ami Jean Duarte Vilela et son neveu, prénommé Antenor. Ils y allèrent à cheval. Le chemin était sinueux et glissant à cause des pierres. Antenor ralentit la marche, s'attardant environ deux cents mètres derrière son oncle et Euripide. Ce dernier dit soudain :

    - Il s'est passé quelque chose.

    - Comment ? demanda Jean en arrêtant son cheval.

    - Antenor est tombé de son cheval et a besoin d'aide. Allons-y.

    Du lieu où se trouvaient Euripide et Jean, il était impossible de voir Antenor et son cheval à terre, car le chemin faisait des virages successifs. Ils rebroussèrent chemin et trouvèrent effectivement le cheval couché sur le corps d'Antenor qui, heureusement, ne s'était pas blessé.

    Ne concluons pas hâtivement qu'il s'agit d'un simple cas de clairvoyance... Quelques kilomètres plus loin, Euripide arrêta son cheval et demanda :

    - Quel est le chemin le plus court ? D'ici à Gameleira ou d'ici à Sacramento ?

    - D'ici à Gameleira, répondit Jean. Pourquoi me demandez-vous cela ?

    - Je viens de faire l'accouchement de madame Ana, et nous n'avons plus besoin de poursuivre le voyage. Mais comme nous ne sommes pas loin de sa ferme, allons prendre un café...

    Stupéfaits, Jean et Antenor constatèrent l'authenticité du phénomène : Euripide avait réalisé, en tant qu'esprit, l'accouchement de madame Ana, quelques minutes plus tôt !

    Le cas de madame Edalides Milan.

    Un cas tout aussi remarquable m'a été rapporté par la soeur d'Euripide : madame Edalides Milan da Cunha, épouse de José Rezende da Cunha.

    Elle me raconta qu'elle était enceinte et avait eu un malaise. Au même moment, Euripide, qui était au Collège Allan Kardec, avait reçu un message télépathique du docteur Bezerra de Menezes :

    - "Allez chez votre soeur Edalides. Sa vie est en danger".

    Le médium termina le cours plus tôt et en arrivant chez elle, il la retrouva prosternée et souffrante. Il lui dit alors ce qui était arrivé au collège et ajouta, en transe :

    - Le docteur Bezerra me dit maintenant que vous avez besoin d'une intervention obstétrique urgente.

    - j'ai vraiment très mal aujourd'hui, mais c'est la grossesse... C'est normal.

    - Non, ce n'est pas normal. Le docteur Bezerra propose de retirer l'enfant qui est mort depuis plusieurs jours dans votre ventre. Nous ne pouvons perdre une minute de plus !

    Edalides fut stupéfaite : l'enfant avait déjà six mois !

    - L'enfant est mort, votre vie est en danger, insista Euripide.

    Edalides regarda son frère en transe médiumnique, fit une prière et autorisa l'opération.

    Euripide, sans aucun anesthésiant et avec un jeu d'instruments limité, retira alors l'enfant déjà en état de putréfaction...

    J'ai relevé un cas similaire, bénéficiant madame Leonilla Ribi, épouse d'Eduardo Dietrich Ribi, résidant au lieu-dit Usina de Chimarro, près de la ville d'Araraquara. La seule différence par rapport au cas précédent est qu'Euripide fit le travail en tant qu'esprit.

    Euripide sauve mère et fils.

    Euripide Barsanulfo n'a jamais refusé de soigner quelqu'un, même si le malade était un ennemi de la Doctrine des Esprits. Ainsi, plus d'un demi-siècle après sa désincarnation, son nom est toujours très admiré, et sa photo est fixée dans presque toutes les maisons, hôtels, pensions et même dans les restaurants du Brésil central. Le cas suivant le confirme.

    Adevita Goulart, la jeune épouse de M. Odorico Tormin, était très riche et donc très respectée dans la société de Sacramento. C'était une catholique fervente, qui ne supportait pas le nom d'Euripide Barsanulfo... Mais elle tomba enceinte et la position de l'enfant mit sa vie en danger. L'accouchement était très difficile et les médecins pensaient que la mère ou l'enfant allait mourir.

    - Je crois que nous devrions consulter Euripide, dit la mère d'Adevita. Il a fait beaucoup d'accouchements compliqués et aucune femme n'est morte entre ses mains. Quand tu étais petite fille, tu avais eu le typhus et avais été déclarée inguérissable par les médecins. C'est Euripide qui t'a sauvée !

    - C'est vrai, mais la ville sait que je suis ennemie de ses idées religieuses. Ce serait honteux de l'appeler... De plus, il pourrait refuser de faire l'accouchement...

    - Je l'appellerai quand même.

    Euripide passait justement sur le trottoir, et la mère d'Adevita le rejoignit pour lui exposer la situation.

    - Elle et le bébé sont en danger ! Pour l'amour de Dieu, Euripide ! Sauvez au moins ma fille Adevita ! Ne la laissez pas mourir !

    - Elle sera sauvée, et le bébé aussi ! répondit le médium. Ayons foi en Jésus !

    Quelques jours plus tard, madame Adevita et son mari berçaient le petit garçon Odon Tormin, qui allait devenir un illustre médecin d'Uberaba.

    Une épreuve pour Euripide.

    Carlos Teodoro da Cunha, propriétaire de la Ferme du Rio das Velhas, était venu à Sacramento avec l'intention de ridiculiser Euripide Barsanulfo. Il se rendit à la pharmacie "Espoir et Charité" et, masquant un sourire, il demanda au médium de lui donner immédiatement un médicament pour Cristina, son épouse, qui allait très mal...

    Euripide prépara le médicament, mais avant de le remettre au fermier malin, il recommanda :

    - Prenez garde. Si vous ne lui donnez pas ce médicament, elle mourra. Pressez votre cheval car votre épouse madame Cristina est mourante !

    Carlos mit le médicament dans sa poche et sortit de la pharmacie en pensant : "Quel farceur ! Cristina est en parfaite santé. Mais, et si c'était vrai ? Mieux vaut m'en assurer..."

    Il pressa son cheval en direction de la ferme. Lorsqu'il mit pied à terre, on lui annonça immédiatement que son épouse était alitée, extrêmement pâle, la respiration quasi imperceptible...

    - Mon Dieu ! C'était donc vrai ! s'exclama le fermier.

    Il donna immédiatement à son épouse le médicament préparé par Euripide.

    Le même soir, Cristina commença à récupérer. Carlos, qui était presque béat, se convertit au Spiritisme.

    La varicelle.

    A une époque, il y eut une épidémie de varicelle à Sacramento. Le virus avait atteint la soeur de Jean Duarte Vilela. Il désirait lui rendre visite, mais il craignait la contagion... Comme il avait une confiance absolue en la médiumnité d'Euripide, son compère et ami, il lui demanda :

    - Qu'en pensez-vous ? Serai-je contaminé ?

    - Non, mais avant d'y aller, prenez une tisane de "mular".

    - Je n'ai jamais entendu parler de cette herbe.

    - Il y en a sous le grand arbre de votre pâturage. Cueillez-la, cher ami.

    - Comment connaissez-vous son action ?

    - Les esprits viennent de me le dire. Allez en chercher.

    Jean obéit ; il la trouva exactement sous le plus grand arbre de son pâturage. Justina, la bonne, prépara la tisane. La famille entière en but sauf Justina, qui ne croyait pas à l'effet de cette herbe.

    Quelques jours plus tard, Justina était alitée avec la varicelle...

    L'élève qui voulait voir pour croire.

    Ouvrons une petite parenthèse sur le fait suivant. Lorsqu'il se libérait du corps somatique, le corps spirituel d'Euripide ne devenait pas toujours tangible, même lorsqu'il agissait sur la matière. Voici des exemples qu'il ne faut pas (je le répète) interprétér comme de la clairvoyance, mais comme des cas de "dédoublement". Euripide les considérait d'ailleurs ainsi.

    Jerônimo Cândido Gomide avait un corps robuste dès l'âge de vingt et un ans. Il était concierge et infirmier des obsédés internés au Collège Allan Kardec. Un matin, il vit le professeur Euripide assis sur une chaise sous la tonnelle fleurie du collège. Il passa silencieusement en pensant qu'il dormait...

    - Où allez-vous en marchant à pas feutrés? demanda le médium.

    - Je marche ainsi pour ne pas vous réveiller.

    - Monsieur Jerônimo, il y a quelques secondes j'étais en esprit chez madame Mariquinha, à Zagáia ; sa petite fille qui avait le croup4 est morte il y a moins d'une minute. Madame Mariquinha est en train de m'insulter et de blasphémer Dieu et Jésus.

    Jerônimo acquiesça de la tête, mais... resta sceptique. La petite fille était hier encore si gaie ! En faisant semblant de balayer la cour, il contourna l'immeuble et sortit discrètement dans la rue, courut jusqu'à Zagáia et trouva effectivement la petite fille morte sur le lit et madame Mariquinha qui criait et blasphémait. Il revint au collège ; Euripide Barsanulfo était toujours assis sur la chaise...

    - Venez ici, monsieur Jerônimo. Est-ce bien comme je vous l'ai raconté ?

    - Oui monsieur ! Mais comment savez-vous que je suis allé vérifier ?

    - Je vous ai accompagné en esprit. Eh oui ! On ne peut pas empêcher la désincarnation. La petite fille devait abandonner la terre, mais la mère ne comprend rien aux lois de Dieu et blasphème. Quant à vous, monsieur Jerônimo, vous êtes comme Saint Thomas : vous ne croyez que ce que vous voyez...

    Une hémorragie.

    Un soir, la petite Itália entra affolée chez madame Vitorina de Jésus, mère de Jerônimo Cândido Gomide, en disant :

    - Jerônimo ! Aidez-moi ! Ma mère est en train de mourir ! Appelez monsieur Euripide !

    - Que s'est-il passé ?

    - Ma mère est ensanglantée !

    - Etait-ce un coup de couteau ?

    - Je ne sais pas.

    Jerônimo, alors jeune garçon, courut appeler Euripide. Avant même qu'il prît la parole, le médium lui tendit un paquet de médicaments.

    - C'est pour madame Casimira.

    - Vous ne savez même pas ce qui est arrivé et vous me donnez déjà des médicaments ? Elle a été frappée, monsieur Euripide ! Elle est en train de mourir...

    Euripide Barsanulfo sourit.

    - J'y suis allé en esprit ; personne n'a frappé madame Casimira. Quand vous serez plus grand, monsieur Jerônimo, je vous expliquerai ce qui lui est arrivé. Maintenant, apportez-lui les médicaments.

    Le lendemain, la mère de la petite Itália était guérie de son hémorragie utérine...

    Anselma et Saint Augustin.

    Une femme, aussi belle que malheureuse, vivait à Sacramento. C'était Anselma. Adolescente, son petit ami l'avait séduite, mais il l'abandonna... En l'apprenant, les parents l'expulsèrent du foyer et Anselma se livra à la prostitution. Plus tard, elle s'était rachetée et devint la meilleure confiseuse de Sacramento. Mais elle conservait le vice de l'alcool et lorsqu'elle pensait à son triste passé, elle s'enivrait jusqu'à perdre complètement le contrôle de soi.

    Un soir, une violente tempête s'était abattue sur la ville et Anselma, ivre, était dans la rue. L'eau argileuse, à la hauteur de ses genoux, coulait comme un torrent et menaçait de l'entraîner... Anselma vacillait et criait au secours. Jerônimo Cândido Gomide et Francisco Magalhaes, qui se trouvaient sur le balcon du Collège Allan Kardec, entendirent ses cris.

    - C'est Anselma ! Elle est ivre et peut mourir dans la tempête ! Amenons-la au collège.

    - En faisant cela, Jerônimo, demain, tout le voisinage en parlera. Ils diront que nous avions d'autres intentions.

    - Mais la femme peut mourir ! Ecoute ses cris !

    Ils amenèrent Anselma dans la salle du collège, la recouvrirent de plusieurs couvertures et s'en allèrent. Mais Anselma, saoule, se releva du canapé puis, les bras ouverts et regardant le plafond, elle commença à crier :

    - J'ai compris Saint Augustin ! Je vous obéirai ! J'ai compris Saint Augustin ! Je vous obéirai !

    Jerônimo et Francisco se regardèrent, craignant que le voisinage entende les cris.

    - Je vais la faire arrêter de crier, par la force si nécessaire, dit Jerônimo.

    Il s'y rendit. Anselma criait toujours :

    - J'ai compris, Saint Augustin ! Je vous obéirai !

    Jerônimo, qui était alors concierge du collège et infirmier des obsédés violents, la secoua plusieurs fois en lui demandant de se taire. A chaque secousse, elle criait encore plus fort :

    - J'ai compris, Saint Augustin ! Je vous obéirai !

    Rien ne faisait taire Anselma ; Jerônimo capitula et alla dormir. Le lendemain, avant d'ouvrir le portail du collège, il vit avec satisfaction qu'Anselma avait disparu. Jerônimo pensa qu'il devait tout de même en parler à Euripide. Dès que le médium arriva avec son parapluie habituel, Jerônimo s'approcha.

    - Bonjour monsieur Euripide ! Je voudrais vous dire...

    - Vous n'avez pas besoin de me raconter, monsieur Jerônimo. J'étais présent. Je vous ai aidé à ramener madame Anselma au collège pendant la tempête. C'était difficile, mais tout s'est bien passé ! Vous avez pratiqué un bel acte de charité. Cependant monsieur Jerônimo, il ne fallait pas utiliser la force avec madame Anselma car elle était effectivement endoctrinée par Saint Augustin, l'un de nos frères de la spiritualité supérieure. Votre violence a un peu gêné, mais heureusement madame Anselma a cessé de boire !

    Le cas d'Ana Garcia de Castro.

    La famille d'Ana Garcia de Castro habitait la ferme Ribalta, appartenant à Alfred Vilela de Andrade, près de la gare Delta à Igarapava (Minas Gerais).

    A dix-sept ans, Ana eut une forte grippe et en conséquence, elle souffrit d'une infection pulmonaire ; elle toussait, avait de fortes fièvres et maigrissait considérablement. Son père Francisco Garcia, métayer de la ferme, appela le docteur Pondé à Igarapava ; mais le médecin, trouvant que la gare de Delta était éloignée, lui demanda d'amener Ana à son cabinet de consultation. Sa faiblesse physique ne le permettait pas, le voyage devant se faire à cheval. Puis, pour se débarrasser du cas, le docteur Pondé prescrivit quelques pilules... Ana allait de mal en pis. C'est alors que le propriétaire de la ferme conseilla à Francisco de se rendre chez Euripide Barsanulfo, et il lui remit une lettre de présentation.

    A l'aube, Francisco Garcia partit à cheval vers Sacramento. Il y arriva le matin. En se mêlant aux gens devant la pharmacie "Espoir et Charité", il entendit avec surprise Euripide dire à voix haute :

    - Un homme vient d'arriver de la gare de Delta avec une lettre de mon ami Alfred Vilela. Cet homme peut s'approcher...

    Francisco était stupéfait. Comment le médium savait-il qu'Alfred lui avait envoyé une lettre et que le porteur inconnu était arrivé à ce moment précis ? Il leva le bras et s'approcha, l'enveloppe à la main.

    - Voici la lettre. Je suis venu parce que ma fille est très malade...

    - Donnez-lui ce médicament. Il va lui faire du bien ! répondit Euripide en souriant...

    Francisco le remercia, remonta à cheval et rentra à la ferme. En arrivant, il eut une surprise : sa fille Ana s'alimentait, sans fièvre, sans toux et sans douleur aux poumons !

    Alfred Vilela, qui était spirite, expliqua :

    - Ce matin, alors que vous étiez parti à Sacramento, Euripide est venu en tant qu'esprit à la ferme voir Ana, suite à une prière que je lui ai adressée ! Matérialisé pendant quelques minutes, il l'a guérie. Elle n'a plus besoin de prendre le médicament qu'il vous a remis en souriant...

    Francisco Garcia se convertit au Spiritisme.

    Ce cas m'a été transmis à Sao Paulo par Ana Garcia de Castro en personne.

    Le dentier.

    Un jour, un couple désespéré entra dans la pharmacie d'Euripide.

    - Nous habitons Uberaba et mon mari, il y a quelques jours, a avalé la partie inférieure de son dentier ! Elle est coincée dans la gorge et on la voit à peine. Les médecins veulent l'opérer. Aidez-nous s'il vous plaît !

    Le mari, accompagné de son épouse, respirait prudemment. Il ouvrit la bouche et Euripide y jeta un coup d'oeil.

    - Je pense qu'on peut retirer la pièce sans opération. Peut-être avec une pince...

    - Les médecins d'Uberaba ont essayé avec plusieurs instruments et n'ont même pas réussi à la toucher ! Elle est coincée.

    - Je sais. Restez calme, madame, et installez votre mari sur cette chaise la tête bien inclinée vers l'arrière.

    Euripide, assisté par l'esprit du docteur Bezerra de Menezes, retira le malheureux dentier avec une simple pince de dentiste, sans que le patient ait eu ni accès de toux, ni envie de vomir, ni hémorragie !


    1 Antenor Germano da Silva, malgré son âge avancé, était très jovial. Il a beaucoup collaboré à cet ouvrage. Pendant plusieurs générations, il a été professeur au Collège Allan Kardec, enseignant l'histoire, la géographie et les mathématiques. Il se désincarna en 1973, et la même année, la mairie de Sacramento baptisa une rue à son nom, et une place au nom de Homilton Wilson (frère d'Euripide).


    2 N.d.T.: Oiseau passériforme, dont le chant est très mélodieux.


    3 Kardec, Allan, Livre des Médiums, item 105.


    4 Diphtérie du larynx.