CHAPITRE II

NOTIONS ELEMENTAIRES DE SPIRITISME

Nous avons dit que le meilleur moyen de s'éclairer sur le spiritisme est d'en étudier au préalable la théorie ; les faits viendront ensuite naturellement, et on les comprendra, quel que soit l'ordre dans lequel ils seront amenés par les circonstances. Nos publications sont faites dans le but de favoriser cette étude ; voilà, à cet effet, l'ordre que nous conseillons.
La première lecture à faire est celle de ce résumé qui présente l'ensemble et les points les plus saillants de la science ; avec cela on peut déjà s'en faire une idée et se convaincre qu'au fond il y a quelque chose de sérieux. Dans ce rapide exposé nous nous sommes attachés à indiquer les points qui doivent particulièrement fixer l'attention de l'observateur. L'ignorance des principes fondamentaux est la cause des fausses appréciations de la plupart de ceux qui jugent ce qu'ils ne comprennent pas, ou d'après leurs idées préconçues.
Si ce premier aperçu donne le désir d'en savoir davantage, on lira le Livre des Esprits où les principes de la doctrine sont complètement développés ; puis le Livre des médiums pour la partie expérimentale, destiné à servir de guide à ceux qui veulent opérer eux-mêmes, comme à ceux qui veulent se rendre compte des phénomènes. Viennent ensuite les divers ouvrages où sont développées les applications et les conséquences de la doctrine, tels que : La morale de l'Evangile selon le spiritisme, Le ciel et l'enfer selon le spiritisme, etc..
La Revue spirite est en quelque sorte un cours d'applications par les nombreux exemples et les développements qu'elle renferme, sur la partie théorique et sur la partie expérimentale.
Aux personnes sérieuses, qui ont fait une étude préalable, nous nous faisons un plaisir de donner verbalement les explications nécessaires sur les points qu'elles n'auraient pas complètement compris.

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OBSERVATIONS PRELIMINAIRES.

1. C'est une erreur de croire qu'il suffit à certains incrédules de voir des phénomènes extraordinaires pour être convaincus. Ceux qui n'admettent pas d'âme ou d'Esprit en l'homme, ne peuvent en admettre hors de l'homme ; par conséquent, niant la cause, ils nient l'effet. Ils arrivent ainsi, presque toujours, avec une idée préconçue et un parti pris de dénégation qui les détourne d'une observation sérieuse et impartiale ; ils font des questions et des objections auxquelles il est impossible de répondre instantanément d'une manière complète, parce qu'il faudrait, pour chaque personne, faire une sorte de cours et reprendre les choses depuis le commencement. L'étude préalable a pour résultat de répondre d'avance aux objections, dont la plupart sont fondées sur l'ignorance de la cause des phénomènes, et des conditions dans lesquelles ils se produisent.

2. Ceux qui ne connaissent pas le spiritisme, se figurent qu'on produit des phénomènes spirites comme on fait des expériences de physique et de chimie. De là leur prétention de les soumettre à leur volonté, et leur refus de se placer dans les conditions nécessaires pour l'observation. N'admettant pas, en principe, l'existence et l'intervention des Esprits, ou tout au moins ne connaissant ni leur nature, ni leur mode d'action, ils agissent comme s'ils opéraient sur de la matière brute ; et de ce qu'ils n'obtiennent pas ce qu'ils demandent, ils concluent qu'il n'y a pas d'Esprits.
En se plaçant à un autre point de vue, on comprendra que les Esprits étant les âmes des hommes, après la mort nous serons nous-mêmes Esprits, et que nous serions peu disposés à servir de jouet pour satisfaire les fantaisies des curieux.

3. Bien que certains phénomènes puissent être provoqués, par la raison qu'ils proviennent d'intelligences libres, ils ne sont jamais à la disposition absolue de qui que ce soit, et quiconque se ferait fort de les obtenir à volonté prouverait ou son ignorance ou sa mauvaise foi. Il faut les attendre, les saisir au passage, et souvent c'est au moment où l'on s'y attend le moins que se présentent les faits les plus intéressants et les plus concluants. Celui qui veut sérieusement s'instruire doit donc apporter, en cela comme en toutes choses, de la patience, de la persévérance, et faire ce qui est nécessaire, autrement mieux vaut pour lui ne pas s'en occuper.

4. Les réunions où l'on s'occupe de manifestations spirites ne sont pas toujours dans de bonnes conditions, soit pour obtenir des résultats satisfaisants, soit pour amener la conviction : il en est même, il faut en convenir, d'où les incrédules sortent moins convaincus qu'en entrant, objectant à ceux qui leur parlent du caractère sérieux du spiritisme, les choses souvent ridicules dont ils ont été témoins. Ils ne sont pas plus logiques que celui qui jugerait d'un art par les ébauches d'un écolier, d'une personne par sa caricature, ou d'une tragédie par sa parodie. Le spiritisme a aussi ses écoliers, celui qui veut s'éclairer ne puise pas ses renseignements à une seule source ; ce n'est que par l'examen et la comparaison qu'il peut asseoir un jugement.

5. Les réunions frivoles ont un grave inconvénient pour les novices qui y assistent, en ce qu'elles leur donnent une fausse idée du caractère du spiritisme. Ceux qui n'ont assisté qu'à des réunions de ce genre, ne sauraient prendre au sérieux une chose qu'ils voient traiter avec légèreté par ceux-mêmes qui s'en disent les adeptes. Une étude préalable leur apprendra à juger la portée de ce qu'ils voient, et à faire la part du bon et du mauvais.

6. Le même raisonnement s'applique à ceux qui jugent le spiritisme sur certains ouvrages excentriques qui ne peuvent en donner qu'une idée incomplète et ridicule. Le spiritisme sérieux n'est pas plus responsable de ceux qui le comprennent mal ou le pratiquent à contre-sens, que la poésie n'est responsable de ceux qui font de mauvais vers. Il est fâcheux, dit-on, que de tels ouvrages existent, car ils font tort à la véritable science. Il serait sans doute préférable qu'il n'y en eût que de bons ; mais le plus grand tort est à ceux qui ne se donnent pas la peine de tout étudier. Tous les arts, toutes les sciences, d'ailleurs, sont dans le même cas ; n'y a-t-il pas sur les choses les plus sérieuses des traités absurdes et remplis d'erreurs ? Pourquoi le spiritisme serait-il privilégié sous ce rapport, surtout à son début ? Si ceux qui le critiquent ne le jugeaient pas sur des apparences, ils sauraient ce qu'il admet et ce qu'il rejette, et ne le chargeraient pas de ce qu'il répudie au nom de la raison et de l'expérience.

DES ESPRITS

7. Les Esprits ne sont point, comme on se le figure souvent, des êtres à part dans la création ; ce sont les âmes de ceux qui ont vécu sur la terre ou dans d'autres mondes, dépouillées de leur enveloppe corporelle. Quiconque admet l'existence de l'âme survivant au corps, admet par cela même celle des Esprits ; nier les Esprits serait nier l'âme.

8. On se fait généralement une idée très fausse de l'état des Esprits ; ce ne sont point, comme quelques-uns le croient, des êtres vagues et indéfinis, ni des flammes comme les feux follets, ni des fantômes comme dans les contes de revenants. Ce sont des êtres semblables à nous, ayant un corps comme le nôtre, mais fluidique et invisible dans l'état normal.

9. Lorsque l'âme est unie au corps pendant la vie, elle a une double enveloppe : l'une lourde, grossière et destructible, qui est le corps ; l'autre fluidique, légère et indestructible, appelée périsprit.

10. Il y a donc en l'homme trois choses essentielles : 1° l'âme ou Esprit, principe intelligent en qui résident la pensée, la volonté et le sens moral ; 2° le corps, enveloppe matérielle, qui met l'Esprit en rapport avec le monde extérieur ; 3° le périsprit, enveloppe fluidique, légère, impondérable, servant de lien et d'intermédiaire entre l'Esprit et le corps.

11. Lorsque l'enveloppe extérieure est usée et ne peut plus fonctionner, elle tombe et l'Esprit s'en dépouille, comme le fruit se dépouille de sa coque, l'arbre de son écorce, le serpent de sa peau, en un mot comme on quitte un vieil habit hors de service : c'est ce qu'on appelle la mort.

12. La mort n'est que la destruction de l'enveloppe matérielle ; l'âme abandonne cette enveloppe comme le papillon quitte sa chrysalide ; mais elle conserve son corps fluidique ou périsprit.

13. La mort du corps débarrasse l'Esprit de l'enveloppe qui l'attachait à la terre et le faisait souffrir ; une fois délivré de ce fardeau, il n'a plus que son corps éthéré, qui lui permet de parcourir l'espace et de franchir les distances avec la rapidité de la pensée.

14. L'union de l'âme, du périsprit et du corps matériel constitue l'homme ; l'âme et le périsprit séparés du corps constituent l'être appelé Esprit.

Remarque. L'âme est ainsi un être simple ; l'Esprit, un être double, et l'homme un être triple. Il serait donc plus exact de réserver le mot âme pour désigner le principe intelligent, et le mot Esprit pour l'être semi-matériel formé de ce principe et du corps fluidique. Mais comme on ne peut concevoir le principe intelligent isolé de toute matière, ni le périsprit sans être animé par le principe intelligent, les mots âme et Esprit sont, dans l'usage, indifféremment employés l'un pour l'autre ; c'est la figure qui consiste à prendre la partie pour le tout, de même qu'on dit d'une ville qu'elle est peuplée de tant d'âmes, un village composé de tant de feux ; mais philosophiquement, il est essentiel d'en faire la différence.

15. Les Esprits, revêtus des corps matériels, constituent l'humanité ou monde corporel visible ; dépouillés de ces corps, ils constituent le monde spirituel ou monde invisible, qui peuplent l'espace et au milieu duquel nous vivons sans nous en douter, comme nous vivons au milieu du monde des infiniment petits que nous ne soupçonnions pas avant l'invention du microscope.

16. Les Esprits ne sont donc point des êtres abstraits, vagues et indéfinis, mais des êtres concrets et circonscrits, auxquels il ne manque que d'être visibles pour ressembler aux humains, d'où il suit que si, à un moment donné, le voile qui les dérobe à la vue pouvait être levé, ils formeraient pour nous toute une population environnante.

17. Les Esprits ont toutes les perceptions qu'ils avaient sur la terre, mais à un plus haut degré, parce que leurs facultés ne sont pas amorties par la matière ; ils ont des sensations qui nous sont inconnues ; ils voient et entendent des choses que nos sens limités ne nous permettent ni de voir ni d'entendre. Pour eux il n'y a point d'obscurité, sauf ceux dont la punition est d'être temporairement dans les ténèbres. Toutes nos pensées se répercutent en eux, et ils y lisent comme dans un livre ouvert ; de sorte que ce que nous pouvions cacher à quelqu'un de son vivant, nous ne le pouvons plus dès qu'il est Esprit (Livre des Esprits, n° 237).

18. Les Esprits sont partout : ils sont parmi nous, à nos côtés, nous coudoyant et nous observant sans cesse. Par leur présence incessante au milieu de nous, les Esprits sont les agents de divers phénomènes ; ils jouent un rôle important dans le monde moral, et jusqu'à un certain point dans le monde physique ; ils constituent ainsi une des puissances de la nature.

19. Dès lors qu'on admet la survivance de l'âme ou de l'Esprit, il est rationnel d'admettre la survivance des affections ; sans cela les âmes de nos parents et de nos amis seraient à jamais perdues pour nous.
Puisque les Esprits peuvent aller partout, il est également rationnel d'admettre que ceux qui nous ont aimés pendant leur vie terrestre, nous aiment encore après la mort, qu'ils viennent auprès de nous, qu'ils désirent se communiquer à nous, et qu'ils se servent pour cela des moyens qui sont à leur disposition ; c'est ce que confirme l'expérience.
L'expérience prouve, en effet, que les Esprits conservent les affections sérieuses qu'ils avaient sur la terre, qu'ils se plaisent à revenir vers ceux qu'ils ont aimés, surtout lorsqu'ils y sont attirés par la pensée et les sentiments affectueux qu'on leur porte, tandis qu'ils sont indifférents pour ceux qui n'ont pour eux que de l'indifférence.

20. Le spiritisme a pour but la constatation et l'étude de la manifestation des Esprits, de leurs facultés, de leur situation heureuse ou malheureuse, et de leur avenir ; en un mot, la connaissance du monde spirituel. Ces manifestations étant avérées, elles ont pour résultat la preuve irrécusable de l'existence de l'âme, de sa survivance au corps, de son individualité après la mort, c'est-à-dire de la vie future ; c'est, par cela même, la négation des doctrines matérialistes, non plus par des raisonnements, mais par des faits.

21. Une idée à peu près générale chez les personnes qui ne connaissent pas le spiritisme, est de croire que les Esprits, par cela seul qu'ils sont dégagés de la matière, doivent tout savoir et posséder la souveraine sagesse. C'est là une erreur grave.
Les Esprits n'étant que les âmes des hommes, celles-ci n'ont point acquis la perfection en quittant leur enveloppe terrestre. Le progrès de l'Esprit ne s'accomplit qu'avec le temps, et ce n'est que successivement qu'il se dépouille de ses imperfections, qu'il acquiert les connaissances qui lui manquent. Il serait aussi illogique d'admettre que l'Esprit d'un sauvage ou d'un criminel devient tout à coup savant et vertueux, qu'il serait contraire à la justice de Dieu de penser qu'il restera perpétuellement dans son infériorité.
Comme il y a des hommes de tous les degrés de savoir et d'ignorance, de bonté et de méchanceté, il en est de même des Esprits. Il y en a qui ne sont que légers et espiègles, d'autres sont menteurs, fourbes, hypocrites, méchants, vindicatifs ; d'autres, au contraire, possèdent les vertus les plus sublimes et le savoir à un degré inconnu sur la terre. Cette diversité dans la qualité des Esprits est un des points les plus importants à considérer, car elle explique la nature bonne ou mauvaise des communications que l'on reçoit ; c'est à les distinguer qu'il faut surtout s'attacher. (Livre des Esprits, n° 100, Echelle spirite. - Livre des Médiums, chapitre XXIV.)

COMMUNICATIONS AVEC LE MONDE INVISIBLE

22. L'existence, la survivance et l'individualité de l'âme étant admises, le spiritisme se réduit à une seule question principale : Les communications entre les âmes et les vivants sont-elles possibles ? Cette possibilité est un résultat d'expérience. Le fait des rapports entre le monde visible et le monde invisible une fois établi, la nature, la cause et le mode de ces rapports étant connus, c'est un nouveau champ ouvert à l'observation et la clef d'une foule de problèmes ; c'est en même temps un puissant élément moralisateur par la cessation du doute sur l'avenir.

23. Ce qui jette dans la pensée de beaucoup de personnes du doute sur la possibilité des communications d'outre tombe, c'est l'idée fausse qu'on se fait de l'état de l'âme après la mort. On se la figure généralement comme un souffle, une fumée, quelque chose de vague, à peine saisissable par la pensée, qui s'évapore et s'en va on ne sait où, mais si loin qu'on a peine à comprendre qu'elle puisse revenir sur la terre. Si on la considère, au contraire, dans son union avec un corps fluidique, semi-matériel, avec lequel elle forme un être concret et individuel, ses rapports avec les vivants n'ont rien d'incompatible avec la raison.

24. Le monde visible vivant au milieu du monde invisible avec lequel il est en contact perpétuel, il en résulte qu'ils réagissent incessamment l'un sur l'autre ; que depuis qu'il y a des hommes il y a des Esprits, et que si ces derniers ont le pouvoir de se manifester, ils ont du le faire à toutes les époques et chez tous les peuples. Cependant, dans ces derniers temps, les manifestations des Esprits ont pris un grand développement et ont acquis un plus grand caractère d'authenticité, parce qu'il était dans les vues de la Providence de mettre un terme à la plaie de l'incrédulité et du matérialisme par des preuves évidentes, en permettant à ceux qui ont quitté la terre de venir attester leur existence et nous révéler leur situation heureuse ou malheureuse.

25. Les rapports entre le monde visible et le monde invisible peuvent être occultes ou patents, spontanés ou provoqués.
Les Esprits agissent sur les hommes d'une manière occulte par les pensées qu'ils leur suggèrent et par certaines influences ; d'une manière patente par des effets appréciables aux sens.
Les manifestations spontanées ont lieu inopinément et à l'improviste ; elles se produisent souvent chez les personnes les plus étrangères aux idées spirites et qui, par cela même, ne pouvant s'en rendre compte, les attribuent à des causes surnaturelles. Celles qui sont provoquées ont lieu par l'entremise de certaines personnes douées à cet effet de facultés spéciales et que l'on désigne sous le nom de médiums.

26. Les Esprits peuvent se manifester de bien des manières différentes : par la vue, par l'audition, par le toucher, par des bruits, le mouvement des corps, l'écriture, le dessin, la musique, etc..

27. Les Esprits se manifestent quelquefois spontanément par des bruits et des coups frappés ; c'est souvent pour eux un moyen d'attester leur présence et d'appeler sur eux l'attention, absolument comme lorsqu'une personne frappe pour avertir qu'il y a quelqu'un. Il en est qui ne se bornent pas à des bruits modérés, mais qui vont jusqu'à faire un vacarme pareil à celui de la vaisselle qui se brise, de portes qui s'ouvrent et se ferment, ou de meubles que l'on renverse ; quelques-uns même causent une perturbation réelle et de véritables dégâts. (Revue spirite, 1858 : L'Esprit frappeur de Bergzabern, p. 125, 153, 184. - Id. L'Esprit frappeur de Dibbelsdorf, p. 219. - Id., 1860 : Le boulanger de Dieppe, p. 76. - Id. Le fabricant de Saint Pétersbourg, p. 115. - Id. Le chiffonnier de la rue des Noyers, p. 236).

28. Le périsprit, quoique invisible pour nous dans l'état normal, n'en est pas moins une matière éthérée. L'Esprit peut, dans certains cas, lui faire subir une sorte de modification moléculaire qui le rende visible et même tangible ; c'est ainsi que se produisent les apparitions. Ce phénomène n'est pas plus extraordinaire que celui de la vapeur qui est invisible quand elle est très raréfiée et qui devient visible quand elle est condensée.
Les Esprits qui se rendent visibles se présentent presque toujours sous les apparences qu'ils avaient de leur vivant et qui peut les faire reconnaître.

29. La vue permanente et générale des Esprits est fort rare, mais les apparitions isolées sont assez fréquentes, surtout au moment de la mort : l'Esprit dégagé semble se hâter d'aller revoir ses parents et ses amis, comme pour les avertir qu'il vient de quitter la terre et leur dire qu'il vit toujours. Que chacun recueille ses souvenirs, et l'on verra combien de faits authentiques de ce genre, dont on ne se rendait pas compte, ont eu lieu non seulement la nuit, pendant le sommeil, mais en plein jour et à l'état de veille le plus complet. Jadis on regardait ces faits comme surnaturels et merveilleux, et on les attribuait à la magie et à la sorcellerie ; aujourd'hui les incrédules les mettent sur le compte de l'imagination ; mais depuis que la science spirite en a donné la clef, on sait comment ils se produisent et qu'ils ne sortent pas de l'ordre des phénomènes naturels.

30. C'est à l'aide de son périsprit que l'Esprit agissait sur son corps vivant ; c'est encore avec ce même fluide qu'il se manifeste en agissant sur la matière inerte ; qu'il produit les bruits, les mouvements des tables et autres objets qu'il soulève, renverse ou transporte. Ce phénomène n'a rien de surprenant si l'on considère que parmi nous les plus puissants moteurs se trouvent dans les fluides les plus raréfiés et même impondérables, comme l'air, la vapeur et l'électricité.
C'est également à l'aide de son périsprit que l'Esprit fait écrire, parler ou dessiner les médiums ; n'ayant pas de corps tangible pour agir ostensiblement quand il veut se manifester, il se sert du corps du médium dont il emprunte les organes qu'il fait agir comme si c'était son propre corps, et cela par l'effluve fluidique qu'il déverse sur lui.

31. Dans le phénomène désigné sous le nom de tables mouvantes ou tables parlantes, c'est par le même moyen que l'Esprit agit sur la table, soit pour la faire mouvoir sans signification déterminée, soit pour lui faire frapper des coups intelligents indiquant les lettres de l'alphabet pour former des mots et des phrases, phénomène désigné sous le nom de typtologie. La table n'est ici qu'un instrument dont il se sert, comme il le fait du crayon pour écrire ; il lui donne une vitalité momentanée par le fluide dont il la pénètre, mais il ne s'identifie point avec elle. Les personnes qui, dans leur émotion, en voyant se manifester un être qui leur est cher, embrassent la table, font un acte ridicule, car c'est absolument comme si elles embrassaient le bâton dont un ami se sert pour frapper des coups. Il en est de même de celles qui adressent la parole à la table, comme si l'Esprit était enfermé dans le bois, ou comme si le bois était devenu Esprit.
Lorsque des communications ont lieu par ce moyen, il faut se représenter l'Esprit, non dans la table, mais à côté, tel qu'il était de son vivant, et tel qu'on le verrait si, à ce moment, il pouvait se rendre visible. La même chose a lieu dans les communications par l'écriture ; on verrait l'Esprit à côté du médium, dirigeant sa main, ou lui transmettant sa pensée par un courant fluidique.
Lorsque la table se détache du sol et flotte dans l'espace sans point d'appui, l'Esprit ne la soulève pas à force de bras, mais l'enveloppe et la pénètre d'une sorte d'atmosphère fluidique qui neutralise l'effet de la gravitation, comme le fait l'air pour les ballons et les cerfs volants. Le fluide dont elle est pénétrée lui donne momentanément une légèreté spécifique plus grande. Lorsqu'elle est clouée au sol, elle est dans un cas analogue à celui de la cloche pneumatique sous laquelle on fait le vide. Ce ne sont ici que des comparaisons pour montrer l'analogie des effets et non la similitude absolue des causes.
Lorsque la table poursuit quelqu'un, ce n'est pas l'Esprit qui court, car il peut rester tranquillement à la même place, mais qui lui donne l'impulsion par un courant fluidique à l'aide duquel il la fait mouvoir à son gré. Lorsque des coups se font entendre dans la table ou ailleurs, l'Esprit ne frappe ni avec sa main ni avec un objet quelconque ; il dirige sur le point d'où part le bruit un jet de fluide qui produit l'effet d'un choc électrique. Il modifie le bruit comme on peut modifier les sons produits par l'air.
On comprend, d'après cela, qu'il n'est pas plus difficile à l'Esprit d'enlever une personne que d'enlever une table, de transporter un objet d'un endroit à un autre ou de le lancer quelque part ; ces phénomènes se produisent par la même loi.

32. On peut voir, par ce peu de mots, que les manifestations spirites, de quelque nature qu'elles soient, n'ont rien de surnaturel ni de merveilleux. Ce sont des phénomènes qui se produisent en vertu de la loi qui régit les rapports du monde visible et du monde invisible, loi tout aussi naturelle que celles de l'électricité, de la gravitation, etc.. Le spiritisme est la science qui nous fait connaître cette loi, comme la mécanique nous fait connaître la loi du mouvement, l'optique celle de la lumière. Les manifestations spirites étant dans la nature, se sont produites à toutes les époques ; la loi qui les régit étant connue nous explique une foule de problèmes regardés comme insolubles ; c'est la clef d'une multitude de phénomènes exploités et amplifiés par la superstition.

33. Le merveilleux étant complètement écarté, ces phénomènes n'ont plus rien qui répugne à la raison, car ils viennent prendre place à côté des autres phénomènes naturels. Dans les temps d'ignorance, tous les effets dont on ne connaissait pas la cause étaient réputés surnaturels. Les découvertes de la science ont successivement restreint le cercle du merveilleux ; la connaissance de cette nouvelle loi vient le réduire à néant. Ceux donc qui accusent le spiritisme de ressusciter le merveilleux prouvent, par cela même qu'ils parlent d'une chose qu'ils ne connaissent pas.

34. Les manifestations des Esprits sont de deux natures : les effets physiques et les communications intelligentes. Les premiers sont les phénomènes matériels et ostensibles, tels que les mouvements, les bruits, les transports d'objets, etc. ; les autres consistent dans l'échange régulier de pensées à l'aide des signes, de la parole et principalement de l'écriture.

35. Les communications que l'on reçoit des Esprits peuvent être bonnes ou mauvaises, justes ou fausses, profondes ou légères, selon la nature des Esprits qui se manifestent. Ceux qui prouvent de la sagesse et du savoir sont des Esprits avancés qui ont progressé ; ceux qui prouvent de l'ignorance et de mauvaises qualités sont des Esprits encore arriérés, mais chez qui le progrès se fera avec le temps.
Les Esprits ne peuvent répondre que sur ce qu'ils savent, selon leur avancement, et, de plus, sur ce qu'il leur est permis de dire, car il est des choses qu'ils ne doivent pas révéler, parce qu'il n'est pas encore donné aux hommes de tout connaître.

36. De la diversité dans les qualités et les aptitudes des Esprits, il résulte qu'il ne suffit pas de s'adresser à un Esprit quelconque pour avoir une réponse juste à toute question, car, sur beaucoup de choses, il ne peut donner que son opinion personnelle, qui peut être juste ou fausse. S'il est sage, il avouera son ignorance sur ce qu'il ne sait pas ; s'il est léger ou menteur, il répondra sur tout sans se soucier de la vérité ; s'il est orgueilleux, il donnera son idée comme une vérité absolue. C'est pour cela que saint Jean l'Evangéliste dit : «Ne croyez point à tout Esprit, mais éprouvez si les Esprits sont de Dieu.» L'expérience prouve la sagesse de ce conseil. Il y aurait donc imprudence et légèreté à accepter sans contrôle tout ce qui vient des Esprits. C'est pourquoi il est essentiel d'être édifié sur la nature de ceux auxquels on a affaire. (Livre des Médiums, n° 267.)

37. On reconnaît la qualité des Esprits à leur langage ; celui des Esprits vraiment bons et supérieurs est toujours digne, noble, logique, exempt de contradiction ; il respire la sagesse, la bienveillance, la modestie et la morale la plus pure ; il est concis et sans paroles inutiles. Chez les Esprits inférieurs, ignorants ou orgueilleux, le vide des idées est presque toujours compensé par l'abondance des paroles. Toute pensée évidemment fausse, toute maxime contraire à la saine morale, tout conseil ridicule, toute expression grossière, triviale ou simplement frivole, enfin toute marque de malveillance, de présomption ou d'arrogance sont des signes incontestables d'infériorité chez un Esprit.

38. Les Esprits inférieurs sont plus ou moins ignorants ; leur horizon moral est borné, leur perspicacité restreinte ; ils n'ont des choses qu'une idée souvent fausse et incomplète ; ils sont, en outre, encore sous l'empire des préjugés terrestres qu'ils prennent quelquefois pour des vérités ; c'est pourquoi ils sont incapables de résoudre certaines questions. Ils peuvent nous induire en erreur, volontairement ou involontairement, sur ce qu'ils ne comprennent pas eux-mêmes.

39. Les Esprits inférieurs ne sont pas pour cela tous essentiellement mauvais ; il y en a qui ne sont qu'ignorants et légers ; il en est de facétieux, de spirituels, d'amusants et qui savent manier la plaisanterie fine et mordante. A côté de cela, on trouve dans le monde des Esprits, comme sur la terre, tous les genres de perversité et tous les degrés de supériorité intellectuelle et morale.

40. Les Esprits supérieurs ne s'occupent que des communications intelligentes en vue de notre instruction ; les manifestations physiques ou purement matérielles sont plus spécialement dans les attributions des Esprits inférieurs, vulgairement désignés sous le nom d'Esprits frappeurs, comme, parmi nous, les tours de force sont le fait des saltimbanques et non des savants.

41. Les communications avec les Esprits doivent toujours être faites avec calme et recueillement : on ne doit jamais perdre de vue que les Esprits sont les âmes des hommes et qu'il serait inconvenant d'en faire un jeu et un sujet de plaisanterie. Si l'on a du respect pour la dépouille mortelle, on doit en avoir encore plus pour l'Esprit Les réunions frivoles et légères manquent donc à un devoir, et ceux qui en font partie devraient songer que d'un moment à l'autre ils peuvent entrer dans le monde des Esprits, et qu'ils ne verraient pas avec plaisir qu'on les traitât avec si peu de déférence.

42. Un autre point également essentiel à considérer, c'est que les Esprits sont libres ; ils se communiquent quand ils veulent, à qui il leur convient, et aussi quand ils le peuvent, car ils ont leurs occupations. Ils ne sont aux ordres et au caprice de qui que ce soit, et il n'est donné à personne de les faire venir contre leur gré, ni de leur faire dire ce qu'ils veulent taire ; de sorte que nul ne peut affirmer qu'un Esprit quelconque viendra à son appel à un moment déterminé, ou répondra à telle ou telle question. Dire le contraire, c'est prouver l'ignorance absolue des principes les plus élémentaires du spiritisme ; le charlatanisme seul a des sources infaillibles.

43. Les Esprits sont attirés par la sympathie, la similitude des goûts et des caractères, l'intention qui fait désirer leur présence. Les Esprits supérieurs ne vont pas plus dans les réunions futiles qu'un savant de la terre n'irait dans une assemblée de jeunes étourdis. Le simple bon sens dit qu'il n'en peut être autrement ; ou, s'ils y vont parfois, c'est pour donner un conseil salutaire, combattre les vices, tâcher de ramener dans la bonne voie ; s'ils ne sont pas écoutés, ils se retirent. Ce serait avoir une idée complètement fausse de croire que des Esprits sérieux puissent se complaire à répondre à des futilités, à des questions oiseuses qui ne prouvent ni attachement ni respect pour eux, ni désir réel de s'instruire, et encore moins qu'ils puissent venir se mettre en spectacle pour l'amusement des curieux. Ils ne l'eussent pas fait de leur vivant, ils ne peuvent le faire après leur mort.

44. La frivolité des réunions a pour résultat d'attirer les Esprits légers qui ne cherchent que les occasions de tromper et de mystifier. Par la même raison que les hommes graves et sérieux ne vont pas dans les assemblées légères, les Esprits sérieux ne vont que dans les réunions sérieuses dont le but est l'instruction et non la curiosité ; c'est dans les réunions de ce genre que les Esprits supérieurs se plaisent à donner leurs enseignements.

45. De ce qui précède, il résulte que toute réunion spirite, pour être profitable, doit, comme première condition, être sérieuse et recueillie ; que tout doit s'y passer respectueusement, religieusement, et avec dignité, si l'on veut obtenir le concours habituel des bons Esprits. Il ne faut pas oublier que si ces mêmes Esprits s'y fussent présentés de leur vivant, on aurait eu pour eux des égards auxquels ils ont encore plus de droit après leur mort.

46. En vain allègue-t-on l'utilité de certaines expériences curieuses, frivoles et amusantes pour convaincre les incrédules : c'est à un résultat tout opposé qu'on arrive. L'incrédule, déjà porté à se railler des croyances les plus sacrées, ne peut voir une chose sérieuse dans ce dont on fait une plaisanterie ; il ne peut être porté à respecter ce qui ne lui est pas présenté d'une manière respectable ; aussi, des réunions futiles et légères, de celles où il n'y a ni ordre, ni gravité, ni recueillement, il emporte toujours une mauvaise impression. Ce qui peut surtout le convaincre, c'est la preuve de la présence d'êtres dont la mémoire lui est chère ; c'est devant leurs paroles graves et solennelles, c'est devant les révélations intimes qu'on le voit s'émouvoir et pâlir. Mais, par cela même qu'il a plus de respect, de vénération, d'attachement pour la personne dont l'âme se présente à lui, il est choqué, scandalisé de la voir venir dans une assemblée irrespectueuse, au milieu des tables qui dansent et des lazzis des Esprits légers ; tout incrédule qu'il est, sa conscience repousse cette alliance du sérieux et du frivole, du religieux et du profane, c'est pourquoi il taxe tout cela de jonglerie, et sort souvent moins convaincu qu'il n'était entré.
Les réunions de cette nature font toujours plus de mal que de bien, car elles éloignent de la doctrine plus de personnes qu'elles n'y en amènent, sans compter qu'elles prêtent le flanc à la critique des détracteurs qui y trouvent des motifs fondés de raillerie.

47. C'est à tort qu'on se fait un jeu des manifestations physiques ; si elles n'ont pas l'importance de l'enseignement philosophique, elles ont leur utilité, au point de vue des phénomènes, car elles sont l'alphabet de la science dont elles ont donné la clef. Quoique moins nécessaires aujourd'hui, elles aident encore à la conviction de certaines personnes. Mais elles n'excluent nullement l'ordre et la bonne tenue ans les réunions où on les expérimente ; si elles étaient toujours pratiquées d'une manière convenable, elles convaincraient plus facilement et produiraient, sous tous les rapports, de bien meilleurs résultats.

48. Certaines personnes se font une idée très fausse des évocations ; il en est qui croient qu'elles consistent à faire revenir les morts avec l'appareil lugubre de la tombe. Le peu que nous avons dit à ce sujet doit dissiper cette erreur. Ce n'est que dans les romans, dans les contes fantastiques de revenants et au théâtre qu'on voit les morts décharnés, sortir de leurs sépulcres, affublés de linceuls, et faisant claquer leurs os. Le spiritisme, qui n'a jamais fait de miracles, n'a pas plus fait celui-là que d'autres, et jamais il n'a fait revivre un corps mort : quand le corps est dans la fosse, il y est bien définitivement ; mais l'être spirituel, fluidique, intelligent n'y a point été mis avec son enveloppe grossière ; il s'en est séparé au moment de la mort, et une fois la séparation opérée, il n'a plus rien de commun avec elle.

49. La critique malveillante s'est plu à représenter les communications spirites comme entourées des pratiques ridicules et superstitieuses de la magie et de la nécromancie. Si ceux qui parlent du spiritisme sans le connaître s'étaient donné la peine d'étudier ce dont ils veulent parler, ils se seraient épargné des frais d'imagination ou des allégations qui ne servent qu'à prouver leur ignorance et leur mauvais vouloir. Pour l'édification des personnes étrangères à la science, nous dirons qu'il n'y a, pour communiquer avec les Esprits, ni jours, ni heures, ni lieux plus propices les uns que les autres ; qu'il ne faut, pour les évoquer, ni formules, ni paroles sacramentelles ou cabalistiques ; qu'il n'est besoin d'aucune préparation ni d'aucune initiation ; que l'emploi de tout signe ou objet matériel, soit pour les attirer, soit pour les repousser est sans effet, et que la pensée suffit ; enfin que les médiums reçoivent leurs communications aussi simplement et aussi naturellement que si elles étaient dictées par une personne vivante sans sortir de l'état normal. Le charlatanisme seul pourrait affecter des manières excentriques et ajouter des accessoires ridicules.
L'appel des Esprits se fait au nom de Dieu, avec respect et recueillement ; c'est la seule chose qui soit recommandée aux gens sérieux qui veulent avoir des rapports avec des Esprits sérieux.

BUT PROVIDENTIEL
DES MANIFESTATIONS SPIRITES

50. Le but providentiel des manifestations est de convaincre les incrédules que tout ne finit pas pour l'homme avec la vie terrestre, et de donner aux croyants des idées plus justes sur l'avenir. Les bons Esprits viennent nous instruire en vue de notre amélioration et de notre avancement, et non pour nous révéler ce que nous ne devons pas encore savoir ou ce que nous ne devons apprendre que par notre travail. S'il suffisait d'interroger les Esprits pour obtenir la solution de toutes les difficultés scientifiques, ou pour faire des découvertes et des inventions lucratives, tout ignorant pourrait devenir savant à bon marché, et tout paresseux pourrait s'enrichir sans peine ; c'est ce que Dieu ne veut pas. Les Esprits aident l'homme de génie par l'inspiration occulte, mais ne l'exemptent ni du travail ni des recherches afin de lui en laisser le mérite.

51. Ce serait avoir une idée bien fausse des Esprits que de voir en eux les auxiliaires des diseurs de bonne aventure ; les Esprits sérieux refusent de s'occuper des choses futiles ; les Esprits légers et moqueurs s'occupent de tout, répondent à tout, prédisent tout ce qu'on veut, sans s'inquiéter de la vérité, et se font un malin plaisir de mystifier les gens trop crédules ; c'est pourquoi il est essentiel d'être parfaitement fixé sur la nature des questions qu'on peut adresser aux Esprits. (Livre des Médiums, n° 286 : Questions qu'on peut adresser aux Esprits.)

52. En dehors de ce qui peut aider au progrès moral, il n'y a qu'incertitude dans les révélations que l'on peut obtenir des Esprits. La première conséquence fâcheuse pour celui qui détourne sa faculté du but providentiel, c'est d'être mystifié par les Esprits trompeurs qui pullulent autour des hommes ; la seconde, de tomber sous l'empire de ces mêmes Esprits qui peuvent, par de perfides conseils, conduire à des malheurs réels et matériels sur terre ; la troisième est de perdre, après la vie terrestre, le fruit de la connaissance du spiritisme.

53. Les manifestations ne sont donc point destinées à servir les intérêts matériels ; leur utilité est dans les conséquences morales qui en découlent ; mais n'eussent-elles pour résultat que de faire connaître une nouvelle loi de nature, de démontrer matériellement l'existence de l'âme et son immortalité, ce serait déjà beaucoup, car ce serait une large voie nouvelle ouverte à la philosophie.

DES MEDIUMS

54. Les médiums présentent de très nombreuses variétés dans leurs aptitudes, ce qui les rend plus ou moins propres à l'obtention de tel ou tel phénomène, de tel ou tel genre de communication. Selon ces aptitudes, on les distingue en médiums, à effets physiques, à communications intelligentes, voyants, parlants, auditifs, sensitifs, dessinateurs, polyglottes, poètes, musiciens, écrivains, etc.. On ne peut attendre d'un médium ce qui est en dehors de sa faculté. Sans la connaissance des aptitudes médianimiques, l'observateur ne peut se rendre compte de certaines difficultés, ou de certaines impossibilités qui se rencontrent dans la pratique. (Livre des Médiums, chap. XIV, n° 185).

55. Les médiums à effets physiques sont plus particulièrement aptes à provoquer des phénomènes matériels tels que les mouvements, les coups frappés, etc., à l'aide de tables ou autres objets ; quand ces phénomènes révèlent une pensée, ou obéissent à une volonté, ce sont des effets intelligents qui, par cela même, dénotent une cause intelligente : c'est pour les Esprits une manière de se manifester. Au moyen d'un nombre de coups de convention, on obtient des réponses par oui ou par non, ou la désignation des lettres de l'alphabet qui servent à former des mots ou des phrases. Ce moyen primitif est très long et ne se prête pas à de grands développements. Les tables parlantes furent le début de la science ; aujourd'hui qu'on possède des moyens de communication aussi rapides et aussi complets qu'entre vivants, on ne s'en sert plus guère qu'accidentellement et comme expérimentation.

56. De tous les moyens de communication, l'écriture est à la fois le plus simple, le plus rapide, le plus commode, et celui qui permet le plus de développements ; c'est aussi la faculté que l'on rencontre le plus fréquemment chez les médiums.

57. Pour obtenir l'écriture, on s'est servi, dans le principe, d'intermédiaires matériels tels que corbeilles, planchettes, etc., munies d'un crayon. (Livre des Médiums, chap. XIII, n° 152 et suivants.) Plus tard on a reconnu l'inutilité de ces accessoires et la possibilité, pour les médiums, d'écrire directement avec la main, comme dans les circonstances ordinaires.

58. Le médium écrit sous l'influence des Esprits qui se servent de lui comme d'un instrument ; sa main est entraînée par un mouvement involontaire que le plus souvent il ne peut maîtriser. Certains médiums n'ont aucune conscience de ce qu'ils écrivent ; d'autres en ont une conscience plus ou moins vague, quoique la pensée leur soit étrangère : c'est ce qui distingue les médiums mécaniques des médiums intuitifs ou semi-mécaniques. La science spirite explique le mode de transmission de la pensée de l'Esprit au médium, et le rôle de ce dernier dans les communications. (Livre des Médiums, chap. XV, n° 179 et suivants ; - chap. XIX, n° 223 et suivants.)

59. Le médium ne possède que la faculté de communiquer, mais la communication effective dépend de la volonté des Esprits. Si les Esprits ne veulent pas se manifester, le médium n'obtient rien ; il est comme un instrument sans musicien.
Les Esprits ne se communiquant que lorsqu'ils le veulent, ou le peuvent, ne sont au caprice de personne ; aucun médium n'a le pouvoir de les faire venir à sa volonté et contre leur gré.
Ceci explique l'intermittence de la faculté chez les meilleurs médiums, et les interruptions qu'ils subissent parfois pendant plusieurs mois.
Ce serait donc à tort qu'on assimilerait la médiumnité à un talent. Le talent s'acquiert par le travail ; celui qui le possède en est toujours le maître ; le médium ne l'est jamais de sa faculté, puisqu'elle dépend d'une volonté étrangère.

60. Les médiums à effets physiques qui obtiennent régulièrement et à volonté la production de certains phénomènes, en admettant que ce ne soit pas le fait de la jonglerie, ont affaire à des Esprits de bas étage qui se complaisent à ces sortes d'exhibitions, et qui peut-être ont fait ce métier de leur vivant ; mais il serait absurde de penser que des Esprits tant soit peu élevés s'amusent à faire la parade. (Voir ci-dessus.)

61. L'obscurité nécessaire à la production de certains effets physiques prête sans doute à la suspicion, mais ne prouve rien contre la réalité. On sait qu'en chimie, il est des combinaisons qui ne peuvent s'opérer à la lumière ; que des compositions et des décompositions ont lieu sous l'action du fluide lumineux ; or, tous les phénomènes spirites sont le résultat de la combinaison des fluides propres de l'Esprit et du médium ; ces fluides étant de la matière, il n'y a rien d'étonnant à ce que, dans certains cas, le fluide lumineux soit contraire à cette combinaison.

62. Les communications intelligentes ont également lieu par l'action fluidique de l'Esprit sur le médium ; il faut que le fluide de ce dernier s'identifie avec celui de l'Esprit. La facilité des communications dépend du degré d'affinité qui existe entre les deux fluides. Chaque médium est ainsi plus ou moins apte à recevoir l'impression ou l'impulsion de la pensée de tel ou tel Esprit ; il peut être un bon instrument pour l'un et un mauvais pour un autre. Il en résulte que deux médiums également bien doués étant à côté l'un de l'autre, un Esprit pourra se manifester par l'un et non par l'autre.

63. C'est donc une erreur de croire qu'il suffit d'être médium pour recevoir avec une égale facilité des communications de tout Esprit. Il n'existe pas plus de médiums universels pour les évocations, que pour l'aptitude à produire tous les phénomènes. Les Esprits recherchent de préférence les instruments qui vibrent à leur unisson ; leur imposer le premier venu, serait comme si l'on imposait à un pianiste de jouer du violon, par la raison que sachant la musique, il doit pouvoir jouer de tous les instruments.

64. Sans l'harmonie, qui seule peut amener l'assimilation fluidique, les communications sont impossibles, incomplètes ou fausses. Elles peuvent être fausses, parce qu'à défaut de l'Esprit désiré, il n'en manque pas d'autres prêts à saisir l'occasion de se manifester, et qui se soucient fort peu de dire la vérité.

65. L'assimilation fluidique est quelquefois tout à fait impossible entre certains Esprits et certains médiums ; d'autres fois, et c'est le cas le plus ordinaire, elle ne s'établit que graduellement et à la longue ; c'est ce qui explique pourquoi les Esprits qui ont l'habitude de se manifester par un médium le font avec plus de facilité, et pourquoi les premières communications attestent presque toujours une certaine gêne, et sont moins explicites.

66. L'assimilation fluidique est aussi nécessaire dans les communications par la typtologie que par l'écriture, attendu que, dans l'un et l'autre cas, il s'agit de la transmission de la pensée de l'Esprit, quel que soit le moyen matériel employé.

67. Ne pouvant imposer un médium à l'Esprit qu'on veut évoquer, il convient de lui laisser le choix de son instrument. Dans tous les cas, il est nécessaire que le médium s'identifie préalablement avec l'Esprit par le recueillement et la prière, au moins pendant quelques minutes, et même plusieurs jours d'avance si cela se peut, de manière à provoquer et à activer l'assimilation fluidique. C'est le moyen d'atténuer la difficulté.

68. Lorsque les conditions fluidiques ne sont pas propices à la communication directe de l'Esprit au médium, elle peut se faire par l'intermédiaire du guide spirituel de ce dernier ; dans ce cas la pensée n'arrive que de seconde main, c'est-à-dire après avoir traversé deux milieux. On comprend alors combien il importe que le médium soit bien assisté, car s'il l'est par un Esprit obsesseur, ignorant ou orgueilleux, la communication sera nécessairement altérée.
Ici les qualités personnelles du médium jouent forcément un rôle important, par la nature des Esprits qu'il attire à lui. Les médiums les plus indignes peuvent avoir de puissantes facultés, mais les plus sûrs sont ceux qui, à cette puissance, joignent les meilleures sympathies dans le monde spirituel ; or ces sympathies ne sont nullement garanties par les noms plus ou moins imposants des Esprits, ou que prennent les Esprits qui signent les communications, mais par la nature constamment bonne des communications qu'ils en reçoivent.

69. Quel que soit le mode de communication, la pratique du spiritisme, au point de vue expérimental, présente de nombreuses difficultés, et n'est pas exempte d'inconvénients pour quiconque manque de l'expérience nécessaire. Que l'on expérimente soi-même, ou que l'on soit simple observateur, il est essentiel de savoir distinguer les différentes natures d'Esprits qui peuvent se manifester, de connaître la cause de tous les phénomènes, les conditions dans lesquelles ils peuvent se produire, les obstacles qui peuvent s'y opposer, afin de ne pas demander l'impossible ; il n'est pas moins nécessaire de connaître toutes les conditions et tous les écueils de la médiumnité, l'influence du milieu, des dispositions morales, etc.. (Livre des Médiums, 2° partie.)

ECUEILS DES MEDIUMS

70. Un des plus grands écueils de la médiumnité c'est l'obsession, c'est-à-dire l'empire que certains Esprits peuvent exercer sur les médiums, en s'imposant à eux sous des noms apocryphes et en les empêchant de communiquer avec d'autres Esprits. C'est en même temps un écueil pour l'observateur novice et inexpérimenté qui, ne connaissant pas les caractères de ce phénomène peut être abusé par les apparences, comme celui qui, ne sachant pas la médecine, peut se faire illusion sur la cause et la nature d'un mal. Si l'étude préalable, dans ce cas, est utile pour l'observateur, elle est indispensable pour le médium en ce qu'elle lui fournit les moyens de prévenir un inconvénient qui pourrait avoir pour lui des conséquences fâcheuses ; c'est pourquoi nous ne saurions trop recommander l'étude avant de se livrer à la pratique. (Livre des Médiums, chap. XXIII.)

71. L'obsession présente trois degrés principaux bien caractérisés : l'obsession simple, la fascination et la subjugation. Dans le premier, le médium a parfaitement conscience qu'il n'obtient rien de bon ; il ne se fait aucune illusion sur la nature de l'Esprit qui s'obstine à se manifester à lui et dont il a le désir de se débarrasser. Ce cas n'offre aucune gravité : ce n'est qu'un simple désagrément, et le médium en est quitte pour cesser momentanément d'écrire. L'Esprit se lassant de n'être pas écouté finit par se retirer.
La fascination obsessionnelle est beaucoup plus grave, en ce que le médium se fait complètement illusion. L'Esprit qui le domine s'empare de sa confiance au point de paralyser son propre jugement, pour ce qui regarde les communications, et de lui faire trouver sublimes les choses les plus absurdes.
Le caractère distinctif de ce genre d'obsession est de provoquer chez le médium une excessive susceptibilité ; de le porter à ne trouver bon, juste et vrai que ce qu'il écrit, à repousser, et même à prendre en mauvaise part tout conseil et toute observation critique ; à rompre avec ses amis plutôt que de convenir qu'il est abusé ; à concevoir de la jalousie contre les autres médiums, dont les communications sont jugées meilleures que les siennes ; à vouloir s'imposer dans les réunions spirites dont il s'éloigne quand il ne peut pas y dominer. Il arrive enfin à subir une domination telle que l'Esprit peut le pousser aux démarches les plus ridicules et les plus compromettantes.

72. Un des caractères distinctifs des mauvais Esprits est de s'imposer ; ils donnent des ordres et veulent être obéis ; les bons ne s'imposent jamais : ils donnent des conseils, et si on ne les écoute pas, ils se retirent. Il en résulte que l'impression des mauvais Esprits est presque toujours pénible, fatigante et produit une sorte de malaise ; souvent elle provoque une agitation fébrile, des mouvements brusques et saccadés ; celle des bons Esprits, au contraire, est calme, douce et procure un véritable bien-être.

73. La subjugation obsessionnelle, désignée jadis sous le nom de possession, est une contrainte physique toujours exercée par des Esprits de la pire espèce et qui peut aller jusqu'à la neutralisation du libre arbitre. Elle se borne souvent à de simples impressions désagréables, mais elle provoque quelquefois des mouvements désordonnés, des actes insensés, des cris, des paroles incohérentes ou injurieuses dont celui qui en est l'objet comprend parfois tout le ridicule, mais dont il ne peut se défendre. Cet état diffère essentiellement de la folie pathologique, avec laquelle on le confond à tort, car il n'y a aucune lésion organique ; la cause étant différente, les moyens curatifs doivent être tout autres. En y appliquant le procédé ordinaire des douches et des traitements corporels, on arrive souvent à déterminer une véritable folie, là où il n'y avait qu'une cause morale.

74. Dans la folie proprement dite, la cause du mal est intérieure ; il faut chercher à rétablir l'organisme dans l'état normal ; dans la subjugation, la cause du mal est extérieure ; il faut débarrasser le malade d'un ennemi invisible en lui opposant, non des remèdes, mais une force morale supérieure à la sienne. L'expérience prouve qu'en pareil cas les exorcismes n'ont jamais produit aucun résultat satisfaisant et qu'ils ont plutôt aggravé qu'amélioré la situation. Le spiritisme, en indiquant la véritable cause du mal, peut seul donner les moyens de le combattre. Il faut en quelque sorte faire l'éducation morale de l'Esprit obsesseur ; par des conseils sagement dirigés, on arrive à le rendre meilleur et à lui faire renoncer volontairement à tourmenter le malade, et alors celui-ci est délivré. (Livre des Médiums, n° 279. - Revue spirite, février, mars et juin 1864 : La jeune obsédée de Marmande.)

75. La subjugation obsessionnelle est le plus ordinairement individuelle ; mais lorsqu'une troupe de mauvais Esprits s'abat sur une population, elle peut avoir un caractère épidémique. C'est un phénomène de ce genre qui eut lieu du temps du Christ ; une puissante supériorité morale pouvait seule dompter ces êtres malfaisants, désignés alors sous le nom de démons, et rendre le calme à leurs victimes1.

76. Un fait important à considérer, c'est que l'obsession, de quelque nature qu'elle soit, est indépendante de la médiumnité, et qu'on la rencontre à tous les degrés, principalement la dernière, chez une foule d'individus qui n'ont jamais entendu parler de spiritisme. En effet, les Esprits ayant existé de tout temps ont dû, de tout temps, exercer la même influence ; la médiumnité n'est point une cause, ce n'est qu'un mode de manifestation de cette influence ; d'où l'on peut dire avec certitude que tout médium obsédé a dû subir d'une manière quelconque, et souvent dans les actes les plus vulgaires de la vie, les effets de cette influence ; que sans la médiumnité elle se traduirait par d'autres effets, attribués souvent à ces maladies mystérieuses qui échappent à toutes les investigations de la médecine. Par la médiumnité l'être malfaisant trahit sa présence ; sans la médiumnité, c'est un ennemi caché dont on ne se défie pas.

77. Ceux qui n'admettent rien en dehors de la matière ne peuvent admettre de cause occulte ; mais quand la science sera sortie de l'ornière matérialiste, elle reconnaîtra dans l'action du monde invisible qui nous entoure et au milieu duquel nous vivons, une puissance qui réagit sur les choses physiques aussi bien que sur les choses morales ; ce sera une nouvelle voie ouverte au progrès et la clef d'une foule de phénomènes mal compris.

78. Comme l'obsession ne peut jamais être le fait d'un bon Esprit, un point essentiel c'est de savoir reconnaître la nature de ceux qui se présentent. Le médium non éclairé peut être trompé par les apparences ; celui qui est prévenu épie les moindres signes suspects, et l'Esprit finit par se retirer quand il voit qu'il n'a rien à faire. La connaissance préalable des moyens de distinguer les bons Esprits des mauvais est donc indispensable au médium qui ne veut pas s'exposer à être pris au piège. Elle ne l'est pas moins pour le simple observateur qui peut, par ce moyen, apprécier la valeur de ce qu'il voit ou entend. (Livre des Médiums, chap. XXIV.)

QUALITES DES MEDIUMS

79. La faculté médianimique tient à l'organisme ; elle est indépendante des qualités morales du médium, et on la trouve développée chez les plus indignes comme chez les plus dignes. Il n'en est pas de même de la préférence donnée au médium par les bons Esprits.

80. Les bons Esprits se communiquent plus ou moins volontiers par tel ou tel médium, selon leur sympathie pour son propre Esprit. Ce qui constitue la qualité d'un médium, ce n'est point la facilité avec laquelle il obtient des communications, mais son aptitude à n'en recevoir que de bonnes et à n'être pas le jouet d'Esprits légers et trompeurs.

81. Les médiums qui laissent le plus à désirer au point de vue moral reçoivent quelquefois de très bonnes communications qui ne peuvent venir que de bons Esprits, ce dont on a tort de s'étonner : c'est souvent dans l'intérêt du médium et pour lui donner de sages avis ; s'il n'en profite pas, il n'en est que plus coupable, car il écrit sa propre condamnation. Dieu, dont la bonté est infinie, ne peut refuser assistance à ceux qui en ont le plus besoin. Le vertueux missionnaire qui va moraliser les criminels ne fait pas autre chose que ce que font les bons Esprits avec les médiums imparfaits.
D'un autre côté, les bons Esprits, voulant donner un enseignement utile à tout le monde, se servent de l'instrument qu'ils ont sous la main ; mais ils le quittent quand ils en trouvent un qui leur est plus sympathique et qui met à profit leurs leçons. Les bons Esprits se retirant, les Esprits inférieurs, peu soucieux des qualités morales qui les gênent, ont alors le champ libre.
Il en résulte que les médiums imparfaits moralement et qui ne s'amendent pas sont, tôt ou tard, la proie des mauvais Esprits qui, souvent, les conduisent à la ruine et aux plus grands malheurs en ce monde même. Quant à leur faculté, de belle qu'elle était, et qu'elle serait restée, elle se pervertit d'abord par l'abandon des bons Esprits et finit par se perdre.

82. Les médiums les plus méritants ne sont pas à l'abri des mystifications des Esprits trompeurs ; d'abord parce qu'il n'est personne d'assez parfait pour ne pas avoir un côté faible par lequel il puisse donner accès aux mauvais Esprits ; en second lieu, les bons Esprits le permettent quelquefois pour exercer le jugement, apprendre à discerner la vérité de l'erreur et tenir en défiance, afin qu'on n'accepte rien aveuglément et sans contrôle ; mais la tromperie ne vient jamais d'un bon Esprit, et tout nom respectable dont est signée une erreur est nécessairement apocryphe.
Ce peut encore être une épreuve pour la patience et la persévérance de tout spirite, médium ou non ; celui qui se découragerait pour quelques déceptions prouverait aux bons Esprits qu'ils ne peuvent pas compter sur lui.

83. Il n'est pas plus étonnant de voir de mauvais Esprits obséder des personnes méritantes qu'il n'est surprenant de voir de mauvaises gens s'acharner sur la terre après les hommes de bien.
Il est remarquable que, depuis la publication du Livre des Médiums, les médiums obsédés sont beaucoup moins nombreux, parce qu'étant prévenus, ils se tiennent sur leurs gardes et épient les moindres signes qui peuvent trahir la présence d'un Esprit trompeur. La plupart de ceux qui le sont, ou n'ont pas étudié préalablement, ou n'ont pas mis les conseils à profit.

84. Ce qui constitue le médium proprement dit, c'est la faculté ; sous ce rapport, il peut être plus ou moins formé, plus ou moins développé. Ce qui constitue le médium sûr, celui qu'on peut véritablement qualifier de bon médium, c'est l'application de la faculté, l'aptitude à servir d'interprète aux bons Esprits. Toute faculté à part, la puissance du médium pour attirer les bons Esprits et repousser les mauvais, est en raison de sa supériorité morale ; cette supériorité est proportionnée à la somme des qualités qui fait l'homme de bien ; par là il se concilie la sympathie des bons, et il exerce de l'ascendant sur les mauvais.

85. Par la même raison, la somme des imperfections morales du médium le rapprochant de la nature des mauvais Esprits, lui ôte l'influence nécessaire pour les éloigner ; au lieu que ce soit lui qui s'impose à eux, ce sont eux qui s'imposent à lui. Ceci s'applique non seulement aux médiums, mais à toute personne quelconque, puisqu'il n'en est aucune qui ne reçoive l'influence des Esprits. (Voir ci dessus n° 74 et 75.)

86. Pour s'imposer au médium, les mauvais Esprits savent exploiter habilement tous les travers moraux ; celui qui leur donne le plus de prise, c'est l'orgueil ; aussi est-ce le sentiment qui domine chez le plus grand nombre des médiums obsédés, mais surtout chez ceux qui sont fascinés. C'est l'orgueil qui les porte à croire à leur infaillibilité, et à repousser les avis. Ce sentiment est malheureusement excité par les éloges dont ils sont l'objet ; quand ils ont une faculté un peu transcendante, on les recherche, on les adule ; ils finissent par croire à leur importance ; ils se regardent comme indispensables, et c'est ce qui les perd.

87. Tandis que le médium imparfait s'enorgueillit des noms illustres, le plus souvent apocryphes, que portent les communications qu'il reçoit, et se regarde comme l'interprète privilégié des puissances célestes, le bon médium ne se croit jamais assez digne d'une telle faveur : il a toujours une salutaire défiance de ce qu'il obtient comme qualité, et ne s'en rapporte pas à son propre jugement ; n'étant qu'un instrument passif, il comprend que si c'est bon il ne peut s'en faire un mérite personnel, pas plus qu'il n'en peut être responsable si c'est mauvais, et qu'il serait ridicule de prendre fait et cause pour l'identité absolue des Esprits qui se manifestent à lui ; il laisse juger la question par des tiers désintéressés, sans que son amour propre ait plus à souffrir d'un jugement défavorable que l'acteur n'est passible du blâme infligé à la pièce dont il est l'interprète. Son caractère distinctif est la simplicité et la modestie ; il est heureux de la faculté qu'il possède, non pour en tirer vanité, mais parce qu'elle lui offre un moyen d'être utile, ce qu'il fait volontiers quand on lui en fournit l'occasion, mais sans jamais se formaliser si on ne le met pas au premier rang.
Les médiums sont les intermédiaires et les interprètes des Esprits ; il importe donc à l'évocateur, et même au simple observateur de pouvoir apprécier le mérite de l'instrument.

88. La faculté médianimique est un don de Dieu comme toutes les autres facultés, que l'on peut employer pour le bien comme pour le mal et dont on peut abuser. Elle a pour objet de nous mettre en rapport direct avec les âmes de ceux qui ont vécu, afin de recevoir leurs enseignements et de nous initier à la vie future. Comme la vue nous met en rapport avec le monde visible, la médianimité nous met en rapport avec le monde invisible. Celui qui s'en sert dans un but utile, pour son propre avancement et celui de ses semblables, remplit une véritable mission dont il aura la récompense. Celui qui en abuse et l'emploie à des choses futiles ou dans des vues d'intérêt matériel, la détourne de son but providentiel ; il en subit tôt ou tard la peine, comme celui qui fait un mauvais usage d'une faculté quelconque.

CHARLATANISME

89. Certaines manifestations spirites se prêtent assez facilement à l'imitation ; mais de ce qu'elles ont pu être exploitées, comme tant d'autres phénomènes, par la jonglerie et la prestidigitation, il serait absurde d'en conclure qu'elles n'existent pas. Pour celui qui a étudié et qui connaît les conditions normales dans lesquelles elles peuvent se produire, il est aisé de distinguer l'imitation de la réalité ; l'imitation, du reste, ne saurait jamais être complète et ne peut abuser que l'ignorant incapable de saisir les nuances caractéristiques du phénomène véritable.

90. Les manifestations qu'il est le plus facile d'imiter, sont certains effets physiques, et les effets intelligents vulgaires, tels que les mouvements, les coups frappés, les apports, l'écriture directe, les réponses banales, etc. ; il n'en est pas de même des communications intelligentes d'une haute portée ; pour imiter les premiers, il ne faut que de l'adresse ; pour simuler les autres, il faudrait presque toujours une instruction peu commune, une supériorité intellectuelle hors ligne, et une faculté d'improvisation pour ainsi dire universelle.

91. Ceux qui ne connaissent pas le spiritisme sont généralement portés à suspecter la bonne foi des médiums ; l'étude et l'expérience leur donnent les moyens de s'assurer de la réalité des faits ; mais en dehors de cela, la meilleure garantie qu'ils puissent trouver est dans le désintéressement absolu et l'honorabilité du médium ; il y a des personnes qui, par leur position et leur caractère, échappent à toute suspicion. Si l'appât du gain peut exciter à la fraude, le bon sens dit que là où il n'y a rien à gagner, le charlatanisme n'a rien à faire. (Livre des Médiums, chap. XXVIII, Charlatanisme et jonglerie, médiums intéressés, fraudes spirites, n° 300. - Revue spirite, 1862, page 52.)

92. Parmi les adeptes du spiritisme, on trouve des enthousiastes et des exaltés comme en toutes choses ; ce sont en général les plus mauvais propagateurs, parce qu'on se défie de leur facilité à tout accepter sans un examen approfondi. Le spirite éclairé se défend de l'enthousiasme qui aveugle ; il observe tout froidement et avec calme : c'est le moyen de n'être dupe ni des illusions, ni des mystificateurs. Toute question de bonne foi à part, l'observateur novice doit, avant tout, tenir compte de la gravité du caractère de ceux à qui il s'adresse.

IDENTITE DES ESPRITS

93. Puisqu'on trouve parmi les Esprits tous les travers de l'humanité, on y trouve aussi la ruse et le mensonge ; il en est qui ne se font aucun scrupule de se parer des noms les plus respectables pour inspirer plus de confiance. Il faut donc se garder de croire d'une manière absolue à l'authenticité de toutes les signatures.

94. L'identité est une des grandes difficultés du spiritisme pratique ; elle est souvent impossible à constater, surtout quand il s'agit d'Esprits supérieurs anciens par rapport à nous. Parmi ceux qui se manifestent, beaucoup n'ont pas de noms pour nous ; pour fixer nos idées, ils peuvent prendre celui d'un Esprit connu appartenant à la même catégorie ; de telle sorte que si un Esprit se communique sous le nom de saint Pierre, par exemple, rien ne prouve que ce soit précisément l'apôtre de ce nom ; ce peut être lui, comme ce peut être un Esprit du même ordre, ou envoyé par lui.
La question d'identité est, dans ce cas, tout à fait secondaire, et il y aurait de la puérilité à y attacher de l'importance ; ce qui importe, c'est la nature de l'enseignement ; est-il bon ou mauvais, digne ou indigne du personnage dont il porte le nom ; celui ci l'accepterait-il ou le désavouerait-il ? Là est toute la question.

95. L'identité est plus facile à constater quand il s'agit d'Esprits contemporains dont on connaît le caractère et les habitudes, car c'est par ces mêmes habitudes et les particularités de la vie privée que l'identité se révèle le plus sûrement et souvent d'une manière incontestable. Quand on évoque un parent ou un ami, c'est la personnalité qui intéresse, et il est tout naturel de chercher à constater l'identité ; mais les moyens qu'emploient généralement pour cela ceux qui ne connaissent qu'imparfaitement le spiritisme sont insuffisants et peuvent induire en erreur.

96. L'Esprit révèle son identité par une foule de circonstances qui ressortent des communications où se reflètent ses habitudes, son caractère, son langage et jusqu'à ses locutions familières. Elle se révèle encore par les détails intimes dans lesquels il entre spontanément avec les personnes qu'il affectionne : ce sont les meilleures ; mais il est très rare qu'il satisfasse aux questions directes qui lui sont adressées à ce sujet, surtout si elles le sont par des personnes qui lui sont indifférentes, dans un but de curiosité et d'épreuve. L'Esprit prouve son identité comme il veut, ou comme il peut, selon le genre de faculté de son interprète, et souvent ces preuves sont surabondantes ; le tort est de vouloir qu'il les donne à la manière de l'évocateur ; c'est alors qu'il se refuse de se soumettre à ses exigences. (Livre des Médiums, chap. XXIV : Identité des Esprits - Revue spirite, 1862, page 82 : Fait d'identité.)

CONTRADICTIONS

97. Les contradictions que l'on remarque assez fréquemment dans le langage des Esprits ne peuvent étonner que ceux qui n'ont de la science spirite qu'une connaissance incomplète. Elles sont la conséquence de la nature même des Esprits qui, ainsi que cela a été dit, ne savent les choses qu'en raison de leur avancement et dont quelques uns peuvent savoir moins que certains hommes. Sur une foule de points, ils ne peuvent émettre que leur opinion personnelle qui peut être plus ou moins juste, et conserver le reflet des préjugés terrestres dont ils ne sont pas dépouillés ; d'autres se font des systèmes à eux sur ce qu'ils ne savent pas encore, particulièrement en ce qui touche les questions scientifiques et l'origine des choses. Il n'y a donc rien de surprenant à ce qu'ils ne soient pas toujours d'accord.

98. On s'étonne de trouver des communications contradictoires signées du même nom. Les Esprits inférieurs peuvent seuls tenir, selon les circonstances, un langage différent, mais les Esprits supérieurs ne se contredisent jamais. Quiconque est tant soit peu initié aux mystères du monde spirituel, sait avec quelle facilité certains Esprits se parent de noms d'emprunt pour donner plus de crédit à leurs paroles ; on peut en induire avec certitude que si deux communications, radicalement contradictoires pour le fond de la pensée, portent le même nom respectable, l'une des deux est nécessairement apocryphe.

99. Deux moyens peuvent servir à fixer les idées sur les questions douteuses : le premier est de soumettre toutes les communications au contrôle sévère de la raison, du bon sens et de la logique ; c'est une recommandation que font tous les bons Esprits, et que se gardent bien de faire les Esprits trompeurs qui savent très bien ne pouvoir que perdre à un examen sérieux ; c'est pourquoi ils évitent la discussion et veulent être crus sur parole.
Le second critérium de la vérité est dans la concordance de l'enseignement. Lorsque le même principe est enseigné sur plusieurs points par différents Esprits et des médiums étrangers les uns aux autres, qui ne sont pas sous les mêmes influences, on peut en conclure qu'il est plus dans le vrai que celui qui émane d'une seule source et se trouve contredit par la majorité. (Livre des Médiums, chap. XXVII : Des contradictions et des mystifications. - Revue spirite, avril 1864, p. 99 : Autorité de la doctrine spirite. - La morale de l'Evangile selon le spiritisme, Introduction page VI).

CONSEQUENCES DU SPIRITISME

100. En présence de l'incertitude des révélations faites par les Esprits, on se demande à quoi peut servir l'étude du spiritisme ?
Elle sert à prouver matériellement l'existence du monde spirituel.
Le monde spirituel étant formé des âmes de ceux qui ont vécu, il en résulte la preuve de l'existence de l'âme et de sa survivance au corps.
Les âmes qui se manifestent révèlent leurs joies ou leurs souffrances selon la manière dont elles ont employé la vie terrestre ; il en résulte la preuve des peines et des récompenses futures.
Les âmes ou Esprits, en décrivant leur état et leur situation, rectifient les idées fausses que l'on s'était faites sur la vie à venir, et principalement sur la nature et la durée des peines.
La vie future étant ainsi passée de l'état de théorie vague et incertaine à l'état de fait acquis et positif, il en résulte la nécessité de travailler le plus possible, pendant la vie présente qui est de courte durée, au profit de la vie à venir qui est indéfinie.
Supposons qu'un homme de vingt ans ait la certitude de mourir à vingt-cinq, que fera-t-il pendant ces cinq années ? travaillera-t-il pour l'avenir ? assurément non ; il tâchera de jouir le plus possible : il regarderait comme une duperie de s'imposer de la fatigue et des privations sans but. Mais s'il a la certitude de vivre jusqu'à quatre-vingts ans, il agira tout autrement, parce qu'il comprendra la nécessité de sacrifier quelques instants du repos présent pour s'assurer le repos à venir pendant de longues années. Il en est de même de celui pour qui la vie future est une certitude.
Le doute touchant la vie future conduit naturellement à tout sacrifier aux jouissances du présent ; de là l'importance excessive attachée aux biens matériels.
L'importance attachée aux biens matériels excite la convoitise, l'envie, la jalousie de celui qui a peu contre celui qui a beaucoup. De la convoitise au désir de se procurer à tout prix ce que possède son voisin, il n'y a qu'un pas ; de là, les haines, les querelles, les procès, les guerres et tous les maux engendrés par l'égoïsme.
Avec le doute sur l'avenir, l'homme, accablé dans cette vie par le chagrin et l'infortune, ne voit que dans la mort le terme de ses souffrances ; n'espérant plus rien, il trouve rationnel de les abréger par le suicide.
Sans espoir de l'avenir, il est tout naturel que l'homme s'affecte, se désespère des déceptions qu'il éprouve. Les secousses violentes qu'il en ressent produisent dans son cerveau un ébranlement, cause de la plupart des cas de folie.
Sans la vie future, la vie présente est pour l'homme la chose capitale, l'unique objet de ses préoccupations ; il y rapporte tout : c'est pourquoi il veut à tout prix jouir, non seulement des biens matériels, mais des honneurs ; il aspire à briller, à s'élever au-dessus des autres, à éclipser ses voisins par son faste et par son rang ; de là, l'ambition désordonnée et l'importance qu'il attache aux titres et à tous les hochets de la vanité, pour lesquels il sacrifierait jusqu'à son honneur même, parce qu'il ne voit rien au-delà.
La certitude de la vie future et de ses conséquences change totalement l'ordre des idées et fait voir les choses sous un tout autre jour ; c'est un voile levé qui découvre un horizon immense et splendide. Devant l'infini et le grandiose de la vie d'outre-tombe, la vie terrestre s'efface comme la seconde devant les siècles, comme le grain de sable devant la montagne. Tout y devient petit, mesquin, et l'on s'étonne soi-même de l'importance qu'on attachait à des choses si éphémères et si puériles. De là, dans les événements de la vie, un calme, une tranquillité, qui est déjà du bonheur en comparaison des tracas, des tourments que l'on se donne, du mauvais sang que l'on se fait pour s'élever au-dessus des autres ; de là aussi, pour les vicissitudes et les déceptions, une indifférence même qui, ôtant toute prise au désespoir, écarte les cas les plus nombreux de folie, et détourne de la pensée du suicide. Avec la certitude de l'avenir, l'homme attend et se résigne ; avec le doute, il perd patience parce qu'il n'attend rien du présent.
L'exemple de ceux qui ont vécu prouvant que la somme du bonheur à venir est en raison du progrès moral accompli et du bien que l'on a fait sur la terre ; que la somme du malheur est en raison de la somme des vices et des mauvaises actions, il en résulte chez tous ceux qui sont bien convaincus de cette vérité, une tendance toute naturelle à faire le bien et à éviter le mal.
Quand la majorité des hommes sera imbue de cette idée, qu'elle professera ces principes et pratiquera le bien, il en résultera que le bien l'emportera sur le mal ici-bas ; que les hommes ne chercheront plus à se nuire mutuellement ; qu'ils régleront leurs institutions sociales en vue du bien de tous et non au profit de quelques-uns ; en un mot, ils comprendront que la loi de charité enseignée par le Christ est la source du bonheur, même en ce monde, et ils baseront les lois civiles sur la loi de charité.
La constatation du monde spirituel qui nous entoure et de son action sur le monde corporel, est la révélation d'une des puissances de la nature, et par conséquent la clef d'une foule de phénomènes incompris, dans l'ordre physique aussi bien que dans l'ordre moral.
Quand la science tiendra compte de cette nouvelle force, méconnue par elle jusqu'à ce jour, elle rectifiera une foule d'erreurs provenant de ce qu'elle attribue tout à une cause unique : la matière. La reconnaissance de cette nouvelle cause dans les phénomènes de la nature, sera un levier pour le progrès, et produira l'effet de la découverte de tout nouvel agent. Avec l'aide de la loi spirite, l'horizon de la science s'élargira, comme il s'est élargi à l'aide de la loi de gravitation.
Quand les savants, du haut de la chaire enseignante, proclameront l'existence du monde spirituel et son action dans les phénomènes de la vie, ils infiltreront dans la jeunesse le contre-poison des idées matérialistes, au lieu de la prédisposer à la négation de l'avenir.
Dans les leçons de philosophie classique, les professeurs enseignent l'existence de l'âme et ses attributs selon les différentes écoles, mais sans preuves matérielles, N'est-il pas étrange qu'alors que ces preuves arrivent, elles soient repoussées et traitées de superstitions par ces mêmes professeurs ? N'est-ce pas dire à leurs élèves : nous vous enseignons l'existence de l'âme, mais rien ne la prouve ? Lorsqu'un savant émet une hypothèse sur un point de la science, il recherche avec empressement, il accueille avec joie, les faits qui peuvent, de cette hypothèse, faire une vérité ; comment un professeur de philosophie, dont le devoir est de prouver à ses élèves qu'ils ont une âme, traite-t-il avec dédain les moyens de leur en donner une démonstration patente ?

101. Supposons donc que les Esprits soient incapables de rien nous apprendre que nous ne sachions déjà, ou que nous ne puissions savoir par nous-mêmes, on voit que la seule constatation de l'existence du monde spirituel conduit forcément à une révolution dans les idées ; or une révolution dans les idées amène forcément une révolution dans l'ordre des choses ; c'est cette révolution que prépare le spiritisme.

102. Mais les Esprits font plus que cela ; si leurs révélations sont entourées de certaines difficultés ; si elles exigent de minutieuses précautions pour en constater l'exactitude, il n'en est pas moins vrai que les Esprits éclairés, quand on sait les interroger, et quand cela leur est permis, peuvent nous révéler des faits ignorés, nous donner l'explication de choses incomprises, et nous mettre sur la voie d'un progrès plus rapide. C'est en cela. surtout, que l'étude complète et attentive de la science spirite est indispensable, afin de ne lui demander que ce qu'elle peut donner, et de la manière dont elle peut le donner ; c'est en dépassant les limites qu'on s'expose à être trompé.

103. Les plus petites causes peuvent produire les plus grands effets ; c'est ainsi que d'un petit grain peut sortir un arbre immense ; que la chute d'une pomme a fait découvrir la loi qui régit les mondes ; que des grenouilles sautant dans un plat ont révélé la puissance galvanique ; c'est de même ainsi que du vulgaire phénomène des tables tournantes est sortie la preuve du monde invisible, et de cette preuve une doctrine qui, en quelques années, a fait le tour du monde, et peut le régénérer par la seule constatation de la réalité de la vie future.

104. Le spiritisme enseigne peu ou point de vérités absolument nouvelles, en vertu de l'axiome qu'il n'y a rien de nouveau sous le soleil. Il n'y a de vérités absolues que celles qui sont éternelles ; celles qu'enseigne le spiritisme, étant fondées sur les lois de la nature, ont donc dû exister de tout temps ; c'est pourquoi de tout temps on en trouve les germes qu'une étude plus complète et des observations plus attentives ont développés. Les vérités enseignées par le spiritisme sont donc plutôt des conséquences que des découvertes.
Le spiritisme n'a ni découvert, ni inventé les Esprits ; il n'a pas davantage découvert le monde spirituel auquel on a cru dans tous les temps ; seulement, il le prouve par des faits matériels et le montre sous son véritable jour en le dégageant des préjugés et des idées superstitieuses, qui engendrent le doute et l'incrédulité.

Remarque. Ces explications, tout incomplètes qu'elles sont, suffisent pour montrer la base sur laquelle repose le spiritisme, le caractère des manifestations et le degré de confiance quelles peuvent inspirer selon les circonstances.


1 Une épidémie semblable sévit depuis plusieurs années dans un village de la Haute-Savoie. (Voir la Revue Spirite, avril et décembre 1862 ; janvier, février, avril et mai 1863 : Les possédés de Morzines).